chasse aux prévaricateurs.
Jusqu’où Biya peut-il aller ?
D
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epuis
le 21 février, des anciens directeurs généraux de sociétés d’état, soupçonnés
de s’être rendus coupables de détournement de deniers publics sont interpellés et
mis en détention préventive : en attendant que la procédure judiciaire
engagée à leur encontre aille jusqu’à leur terme, on peut dorés et déjà se
poser certaines questions.
Ce
qu’on leur reproche est pour ainsi dire banal dans notre pays : le
péculat, la prévarication, la corruption et autres malversations en tout genre
sont ancrés dans nos mœurs, et on a l’impression que les personnes honnêtes et
intègres peuvent se compter sur les doigts d’une main. Comment en est-on arrivé
là ? Surtout avec un Président qui, dès son arrivée au pouvoir en 1982 prêchait
rigueur et moralisation ?
Tout le monde
a pointé du doigt la cause du mal : l’impunité ; les auteurs de
ces actes antipatriotiques bénéficiaient d’une complaisance pour le moins
surprenante de la part des autorités chargés de les réprimer; Le président de la république
lui-même, dans son discours de fin d’année 2005 a dit « ça
suffit » ; comment interpréter cette déclaration ? Les pratiques
détestables et condamnables qui sont réprimés aujourd’hui seulement étaient
donc connues, mais tolérées ; le Président endosse donc au moins en partie
la responsabilité du laisser-aller qui a prévalu jusqu’à maintenant, et qui a
encouragé certaines personnes à se livrer sans retenue et sans scrupules aux
comportements préjudiciables à l’intérêt général et au bien commun qui ont été
observés ; c’est lui qui s’est abstenu d’user des pouvoirs à lui conférés
par la loi pour sévir quand il le fallait ; il a été ainsi permis à des
camerounais de s’enrichir insolemment et démesurément sur le dos des autres, au
détriment de la fortune publique ; pourquoi ?
Les sommes
détournées se chiffrent en milliards de CFA ; de quoi donner le
vertige ; les auteurs de ces actes n’étaient pas seulement préoccupés par
leur sécurité matérielle et celle de leurs progénitures apparemment, puisqu’ils
pouvaient y pourvoir largement pour de très longues années avec le
centième des sommes détournées; qu’est ce qui peut expliquer une telle frénésie
dans les détournements ? Qu’est-ce qui peut justifier une telle
cupidité ? désir de fils de
paysans malmenés et traumatisés dans leur enfance par la misère, de prendre
leur revanche sur le destin ? Surtout
que la nomination au poste de DG donne déjà droit à de nombreuses prérogatives comme le précise bien le fameux
article 2. de chaque acte de promotion qui
stipule : « l’intéressé aura droits aux avantage prévus par la
réglementation », ce qui se traduit concrètement par un gros salaire, le
logement avec domestiques, les véhicules de service avec chauffeur, etc…. les fruits de leur rapine sont placés
dans des comptes dans des banques étrangères comme pour dire qu’ils ne se
sentaient pas camerounais, et qu’ils n’étaient là que pour se servir. Faut-il
voir dans cette boulimie financière inextinguible l’intention de se constituer
un trésor de guerre ? Ou plus
simplement la volonté de contrebalancer la puissance financière supposée des Bamiléké,
afin de mieux les combattre le cas échéant ?
Il faut
récupérer l’argent détourné ; ce sont des sommes importantes, qui manquent
cruellement à notre pays, qui faut-il le rappeler est sous développé, pauvre et
très endetté et a besoin de cet argent pour se doter des infrastructures dont
il a besoin, pour donner un traitement
juste et équitable à tous ces citoyens honnêtes qui s’échinent chaque jour dans
des conditions parfois effroyables pour lutter contre la misère et l’ignorance.
C’est cet argent que nous sommes allés quémander honteusement aux Institutions
de Bretton Woods ; ce que les autorités sont allés chercher à Washington,
nous l’avons ici. Le président de
la république le savait bien, lui qui avait
promis, avant de se dédire de ne jamais s’adresser à ces institutions. Et ces chantres
de l’ultralibéralisme forcené nous l’ont accordé dans les conditions
draconiennes que vous savez tous, et que nous autres pauvres citoyens
subissons : l’inflation et les hausses des impôts, l’élargissement de
l’assiette fiscale, les privatisations, la marchandisation des services publics
sociaux.
Parmi les
personnes arrêtées se trouvent des élus ; ces personnes ont réussi à se
faire désigner au sein de leur parti comme candidat, puis à se faire élire,
alors qu’il était de notoriété publique qu’ils n’étaient pas des enfants de
choeur, alors qu’ils ne s’étaient pas distingués par leur probité morale :
comment cela a-t-il pu arriver ? Cette question donne à réfléchir sur les
lois électorales, qui peuvent ainsi permettre l’élection d’individus peu
recommandables, et surtout, sur les conditions de déroulement des élections où par
exemple les morts votent, pendant que les vivants n’arrivent pas à se procurer
la carte électorale, entre autres.
Jusqu’où Monsieur
Biya peut-il aller dans sa croisade ? Notre Administration est infestée de
voleurs et de corrompus, animés par une avidité et une rapacité sans égal, dont
le seul souci est de s’enrichir autant que possible. Les camerounais les
plus riches se recrutent curieusement parmi les fonctionnaires, et non parmi
les hommes d’affaires.
Un pacte
tacite existe : militer dans le RDPC, aller au village tromper les grand –
mères pendant les consultations électorales : cela vous donne la
possibilité de vous faire nommer à de postes juteux où vous pouvez vous livrer
à toutes sortes de pratiques interlopes sans être inquiété. Le RDPC est ainsi un
parti administratif, dont les membres les plus actifs et les plus engagés sont
les fonctionnaires de la haute administration, qui y recherchent impunité,
immunité, couverture et protection. Maintenant
que la donne semble changer, ils sont pour la plupart susceptibles d’être
interpellés. Mais cela va-t-il durer ? car
en effet, les rangs de ce parti vont se vider si les arrestations se
poursuivent.
Les mesures d’assainissement
en cours sont prises avec les encouragements – certains diront sous la pression
– des américains. Les camerounais désabusés
et résignés, semblent avoir renoncé à
engager des actions susceptibles de modifier le cours d’une histoire qui ne
leur est décidément pas favorable jusqu’ici, et attendent que ce soit les
étrangers qui défendent nos intérêts. Les rangs des partis politiques
d’opposition, des syndicats et autres
associations citoyennes semblent désespérément clairsemés, ces structures ayant
du mal à mobiliser les foules pour des causes dont aucun esprit équilibré ne
peut contester valablement la justesse, l’opportunité et la pertinence. et c’est là que réside notre part de
responsabilité dans l’atmosphère permissive et de laisser aller dont ont
longtemps bénéficié les bandits en col blanc.
Ces étrangers peuvent – ils le faire sans
arrière pensée et sans calcul, par pitié ou par pur altruisme ? l’esclavage, la traite négrière, la
crise de la dette des pays du tiers monde, nos rapports malsains avec la France nous montrent que les relations avec les pays
du Nord sont marqués par une exploitation et une domination à notre détriment,
et dont nous continuons de souffrir. Ces régimes corrompus et concussionnaires qui
règnent sur nos pays nous ont été imposés par les pays du Nord, dans une
logique peu soucieuse des intérêts de nos pays. Ce sont bien les américains qui
ont imposé Mobutu au Zaïre.
Les
inspirateurs des motions et autres marches de soutien à qui vous savez, ces
véritables manipulateurs qui les concevaient touts seuls et les faisaient
endosser par des structures fantomatiques et parfois imaginaires constituées en
réalité de badauds rassemblés à la va-vite, comme cela se voit parfois au
défilé, se font curieusement très discrets ; ils sont inquiets pour leur
sort, et pour cause ! Si les arrestations devaient se poursuivre, ils se
retrouvaient tous en taule. Les militants les plus bruyants et les plus
exubérants sont les plus pourris et les plus compromis.
Le cas de
Siyam siéwé, ci-devant Ministre
de l’eau et de l’énergie a de quoi laisser perplexe. Il a été interpellé pour
sa gestion calamiteuse du Port Autonome de Douala (PAD) dont il était le
Directeur Général avant d’être promu membre du gouvernement. Des journaux
avaient dénoncé ladite gestion. Cela n’a pas empêché qu’il soit nommé Ministre.
Comment devient-on Ministre au Cameroun ? N’y a-t-il pas une enquête de
moralité ? Ce qui est inquiétant, c’est que cette remarque peut être
généralisée aux autres ministres.
Le moins que
l’on puisse dire, c’est qu’il aura fallu du temps pour passer des discours aux
actes ; entre les premiers discours sur la rigueur et la moralisation
tenus en 1982 et les actes concrets que nous observons, si tant est que ces
actes ne sont pas la poudre aux yeux des bailleurs de fonds, et s’inscrivent
dans une véritable campagne d’assainissement, il s’est passé – excusez du peu –
23 ans. Dans les pays véritablement démocratiques où le nombre de mandats présidentiels
est limité M. Biya aurait passé au grand maximum 15 ans au pouvoir, si nous
tablons sur une durée de mandat de sept ans. On ne nous avait pas dit que l’on
attendrait si longtemps pour passer des promesses aux actes.
Qu’ont fait tous
ces camerounais qui sont au chômage, qui sont incapables d’envoyer leurs
progénitures à l’écoles, de se soigner, de se nourrir, pour mériter cela ?
260206
Tchassé
jean – claude
Pleg, syndicaliste.
tchasse_jclaude@yahoo.fr
Tel :
713-49-16
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