samedi 5 septembre 2015

Chasse aux prévaricateurs. Jusqu’où Biya peut-il aller ?

Dans cet article écrit en 2006, j'exprimais mon scepticisme; je constate malheureusement que l'avenir m'a donné raison.


chasse aux prévaricateurs.
Jusqu’où Biya peut-il aller ?
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epuis le 21 février, des anciens directeurs généraux de sociétés d’état, soupçonnés de s’être rendus coupables de détournement de deniers publics sont interpellés et mis en détention préventive : en attendant que la procédure judiciaire engagée à leur encontre aille jusqu’à leur terme, on peut dorés et déjà se poser certaines questions.
            Ce qu’on leur reproche est pour ainsi dire banal dans notre pays : le péculat, la prévarication, la corruption et autres malversations en tout genre sont ancrés dans nos mœurs, et on a l’impression que les personnes honnêtes et intègres peuvent se compter sur les doigts d’une main. Comment en est-on arrivé là ? Surtout avec un Président qui, dès son arrivée au pouvoir en 1982 prêchait rigueur et moralisation ?

Tout le monde a pointé du doigt la cause du mal : l’impunité ; les auteurs de ces actes antipatriotiques bénéficiaient d’une complaisance pour le moins surprenante de la part des autorités chargés de les réprimer; Le président de la république lui-même, dans son discours de fin d’année 2005 a dit « ça suffit » ; comment interpréter cette déclaration ? Les pratiques détestables et condamnables qui sont réprimés aujourd’hui seulement étaient donc connues, mais tolérées ; le Président endosse donc au moins en partie la responsabilité du laisser-aller qui a prévalu jusqu’à maintenant, et qui a encouragé certaines personnes à se livrer sans retenue et sans scrupules aux comportements préjudiciables à l’intérêt général et au bien commun qui ont été observés ; c’est lui qui s’est abstenu d’user des pouvoirs à lui conférés par la loi pour sévir quand il le fallait ; il a été ainsi permis à des camerounais de s’enrichir insolemment et démesurément sur le dos des autres, au détriment de la fortune publique ; pourquoi ?

Les sommes détournées se chiffrent en milliards de CFA ; de quoi donner le vertige ; les auteurs de ces actes n’étaient pas seulement préoccupés par leur sécurité matérielle et celle de leurs progénitures apparemment, puisqu’ils pouvaient y pourvoir largement pour de très longues années avec le centième des sommes détournées; qu’est ce qui peut expliquer une telle frénésie dans les détournements ? Qu’est-ce qui peut justifier une telle cupidité ? désir de fils de paysans malmenés et traumatisés dans leur enfance par la misère, de prendre leur revanche sur le destin ?  Surtout que la nomination au poste de DG donne déjà droit à de nombreuses  prérogatives comme le précise bien le fameux article 2. de chaque  acte de promotion qui stipule : « l’intéressé aura droits aux avantage prévus par la réglementation », ce qui se traduit concrètement par un gros salaire, le logement avec domestiques, les véhicules de service avec chauffeur, etc…. les fruits de leur rapine sont placés dans des comptes dans des banques étrangères comme pour dire qu’ils ne se sentaient pas camerounais, et qu’ils n’étaient là que pour se servir. Faut-il voir dans cette boulimie financière inextinguible l’intention de se constituer un trésor de guerre ? Ou   plus simplement la volonté de contrebalancer la puissance financière supposée des Bamiléké, afin de mieux les combattre le cas échéant ?

Il faut récupérer l’argent détourné ; ce sont des sommes importantes, qui manquent cruellement à notre pays, qui faut-il le rappeler est sous développé, pauvre et très endetté et a besoin de cet argent pour se doter des infrastructures dont il a besoin,  pour donner un traitement juste et équitable à tous ces citoyens honnêtes qui s’échinent chaque jour dans des conditions parfois effroyables pour lutter contre la misère et l’ignorance. C’est cet argent que nous sommes allés quémander honteusement aux Institutions de Bretton Woods ; ce que les autorités sont allés chercher à Washington, nous l’avons ici. Le président de la république le savait bien, lui qui avait promis, avant de se dédire de ne jamais s’adresser à ces institutions. Et ces chantres de l’ultralibéralisme forcené nous l’ont accordé dans les conditions draconiennes que vous savez tous, et que nous autres pauvres citoyens subissons : l’inflation et les hausses des impôts, l’élargissement de l’assiette fiscale, les privatisations, la marchandisation des services publics sociaux.
Parmi les personnes arrêtées se trouvent des élus ; ces personnes ont réussi à se faire désigner au sein de leur parti comme candidat, puis à se faire élire, alors qu’il était de notoriété publique qu’ils n’étaient pas des enfants de choeur, alors qu’ils ne s’étaient pas distingués par leur probité morale : comment cela a-t-il pu arriver ? Cette question donne à réfléchir sur les lois électorales, qui peuvent ainsi permettre l’élection d’individus peu recommandables, et surtout, sur les conditions de déroulement des élections où par exemple les morts votent, pendant que les vivants n’arrivent pas à se procurer la carte électorale, entre autres.

Jusqu’où Monsieur Biya peut-il aller dans sa croisade ? Notre Administration est infestée de voleurs et de corrompus, animés par une avidité et une rapacité sans égal, dont le  seul souci est de s’enrichir autant que possible. Les camerounais les plus riches se recrutent curieusement parmi les fonctionnaires, et non parmi les hommes d’affaires.
Un pacte tacite existe : militer dans le RDPC, aller au village tromper les grand – mères pendant les consultations électorales : cela vous donne la possibilité de vous faire nommer à de postes juteux où vous pouvez vous livrer à toutes sortes de pratiques interlopes sans être inquiété. Le RDPC est ainsi un parti administratif, dont les membres les plus actifs et les plus engagés sont les fonctionnaires de la haute administration, qui y recherchent impunité, immunité, couverture  et protection. Maintenant que la donne semble changer, ils sont pour la plupart susceptibles d’être interpellés. Mais cela va-t-il durer ? car en effet, les rangs de ce parti vont se vider si les arrestations se poursuivent.

Les mesures d’assainissement en cours sont prises avec les encouragements – certains diront sous la pression – des  américains. Les camerounais désabusés et résignés,  semblent avoir renoncé à engager des actions susceptibles de modifier le cours d’une histoire qui ne leur est décidément pas favorable jusqu’ici, et attendent que ce soit les étrangers qui défendent nos intérêts. Les rangs des partis politiques d’opposition, des syndicats et  autres associations citoyennes semblent désespérément clairsemés, ces structures ayant du mal à mobiliser les foules pour des causes dont aucun esprit équilibré ne peut contester valablement la justesse, l’opportunité et la pertinence. et c’est là que réside notre part de responsabilité dans l’atmosphère permissive et de laisser aller dont ont longtemps bénéficié les bandits en col blanc.
 Ces étrangers peuvent – ils le faire sans arrière pensée et sans calcul, par pitié ou par pur altruisme ? l’esclavage, la traite négrière, la crise de la dette des pays du tiers monde, nos rapports malsains avec la France  nous montrent que les relations avec les pays du Nord sont marqués par une exploitation et une domination à notre détriment, et dont nous continuons de souffrir. Ces régimes corrompus et concussionnaires qui règnent sur nos pays nous ont été imposés par les pays du Nord, dans une logique peu soucieuse des intérêts de nos pays. Ce sont bien les américains qui ont imposé Mobutu au Zaïre.

Les inspirateurs des motions et autres marches de soutien à qui vous savez, ces véritables manipulateurs qui les concevaient touts seuls et les faisaient endosser par des structures fantomatiques et parfois imaginaires constituées en réalité de badauds rassemblés à la va-vite, comme cela se voit parfois au défilé, se font curieusement très discrets ; ils sont inquiets pour leur sort, et pour cause ! Si les arrestations devaient se poursuivre, ils se retrouvaient tous en taule. Les militants les plus bruyants et les plus exubérants sont les plus pourris et les plus compromis.

Le cas de Siyam siéwé, ci-devant Ministre de l’eau et de l’énergie a de quoi laisser perplexe. Il a été interpellé pour sa gestion calamiteuse du Port Autonome de Douala (PAD) dont il était le Directeur Général avant d’être promu membre du gouvernement. Des journaux avaient dénoncé ladite gestion. Cela n’a pas empêché qu’il soit nommé Ministre. Comment devient-on Ministre au Cameroun ? N’y a-t-il pas une enquête de moralité ? Ce qui est inquiétant, c’est que cette remarque peut être généralisée aux autres ministres.

Le moins que l’on puisse dire, c’est qu’il aura fallu du temps pour passer des discours aux actes ; entre les premiers discours sur la rigueur et la moralisation tenus en 1982 et les actes concrets que nous observons, si tant est que ces actes ne sont pas la poudre aux yeux des bailleurs de fonds, et s’inscrivent dans une véritable campagne d’assainissement, il s’est passé – excusez du peu – 23 ans. Dans les pays véritablement démocratiques où le nombre de mandats présidentiels est limité M. Biya aurait passé au grand maximum 15 ans au pouvoir, si nous tablons sur une durée de mandat de sept ans. On ne nous avait pas dit que l’on attendrait si longtemps pour passer des promesses aux actes.
Qu’ont fait tous ces camerounais qui sont au chômage, qui sont incapables d’envoyer leurs progénitures à l’écoles, de se soigner, de se nourrir, pour mériter cela ?
260206
Tchassé jean – claude
Pleg, syndicaliste.
tchasse_jclaude@yahoo.fr
Tel : 713-49-16


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