REVENDICATIONS
REGIONALISTES DES DEPUTES DU GRAND NORD :
La République menacée.
Cet article a été écrit en mars 2008
Ainsi donc, l’ENS de Maroua, école
financée par l’impôt de tous les camerounais doit être réservée à plus de 60%
aux ressortissants du Grand Nord, au mépris des textes définissant les quotas
régionaux ; dans cette logique, l’Ecole de médecine par exemple de Buéa
doit être réservée aux Bakweri, celle de Douala aux Sawa, celle de Yaoundé aux
Bétis ; où iront les Mankon du Nord Ouest, et les Bulu du Sud ? Et
les Baka de l’Est ?
C’est facile de
répondre à ceux qui sont scandalisés que les députés des autres régions n’ont
qu’à en faire autant ; que deviendrait l’Assemblée dans ces
conditions ? Un lieu pour les revendications régionalistes ?
Ces députés
nordistes qui revendiquent 60% de ressortissants du Nord à l’entrée ne
voyaient que 23% de ressortissants du Nord,
alors que les officiels parlaient de 37% ; comment les ont-ils
comptés ? Ce qui est étonnant, c’est qu’on est allé au-delà des 60%
réclamés.
Un député
représente la nation ; le mandat impératif est nul d’après la
Constitution de la République ; que des députés fassent des revendications
uniquement pour leurs régions respectives, qu’ils ne posent que les problèmes
d’une partie de la République est une violation de la Constitution; ce sont les
députés, des législateurs par essence qui se rendent ainsi coupables de telles
violations ; à qui s’appliquent donc ces lois qu’ils adoptent ?
Que fera donc
l’Est qui est tout aussi, sinon, plus sinistrée que le Grand Nord en
matière d’éducation?
Pourquoi n’y
a-t-il pas assez d’enseignants originaires du Nord ? la réponse n’est pas
compliquée ; comme le premier Président de la République était un
nordiste, il faisait orienter de préférence les ressortissants de sa région
vers l’ENAM, vers l’Ecole militaire ; aujourd’hui, on retrouve les
nordistes surtout comme administrateurs, magistrats, douaniers, inspecteurs de finances, officiers
de l’Armée, etc ; l’enseignement était pour ceux qui n’avaient
personne en haut lieu ; ceux d’entre eux qui par la force des
circonstances se retrouvaient dans l’enseignement étaient très vite
nommés ; les enseignants en poste au Nord ne rêvent que de servir au
Sud ; la corruption aidant, ils désertent leurs postes pour les contrées
plus hospitalières du Sud ; il n’est pas jusqu’aux ressortissants du Nord
qui ne se livrent à ce jeu.
Le Grand Nord a
longtemps été considérée comme la destination des affectations disciplinaires,
concept illégal et inopportun, s’il en fût ; on y envoyait les
fonctionnaires pour les punir ; ce qui fait que même ceux des agents qui y
étaient affectés « normalement » se considéraient comme ayant été
sanctionnés ; la rudesse du climat et les mauvaises conditions de travail
ont achevé de les convaincre de la nécessité de « descendre ». La
corruption ambiante leur a facilité la tâche ; voilà comment il est
possible de déserter les postes sans être sanctionné ; pourvu que l’on soit
docile, on peut choisir son
poste dans ce pays, alors qu’en
principe tout agent doit pouvoir servir là où le devoir l’appelle.
Parlant des
mauvaises conditions de travail, on se rappelle qu’en 1987, un décret
instituant entre autres, la Bourse indiciaire pour les étudiants de l’Ecole
Normale Supérieure avait été signé ; c’est ce même décret qui est à
l’origine du changement de l’intitulé des diplômes de sortie de l’ENS ; le
Diplôme de Professeur de Collèges d’Enseignement Général (DIPCEG) est devenu le
Diplôme de Professeur d’Enseignement Secondaire 1er grade (DIPES I),
et le Diplôme de Professeur de Lycées d’Enseignement Général (DIPLEG), le
Diplôme de Professeur d’Enseignement Secondaire 2ème grade (DIPES II) ; Où est passée la
bourse indiciaire, cette bourse qui était censée résoudre le problème des
enseignants frais émoulus de l’ENS qui devaient passer jusqu’à deux années sur
le terrain avant de percevoir leur traitement salarial, pour cause de lenteur
provoquée et entretenue par des agents véreux et impunis, dans le traitement
des dossiers d’intégration de prise en charge aux Finances ? Voilà la
raison de la désertion des postes par les enseignants ; et ce problème va
continuer de se poser si la Bonne Gouvernance demeure une histoire pour
extorquer de l’argent aux les bailleurs
de fonds, sans volonté réelle de changer.
La
recommandation OIT-UNESCO du 05 octobre 1966, qui est à l’origine de la Journée
Mondiale des Enseignants (JME) donne des indications claires sur les mesures à
prendre pour résoudre ce type de problèmes ; une prime pour les
enseignants qui exercent dans les zones difficiles devrait être instituée,
sinon même ces enseignants dont l’admission est problématique abandonneront
leurs postes ; le recrutement massif avec des arrières pensées
électoralistes ainsi effectué va à l’encontre de la sélection, sur des critères
d’excellence recommandée par ce texte de l’UNESCO ; les enseignants
doivent être choisis parmi les meilleurs postulants ; c’est ce qui
garantira la qualité des enseignements qu’ils dispenseront plus tard, sauf si
dans la logique camerounaise, ils seront tous nommés dans d’autres administrations
dès leur sortie d’Ecole. Car il faut le dire, beaucoup viennent juste chercher
le grade à l’ENS, et ils n’ont pas la moindre intention d’enseigner.
Il a été rappelé
ce qui s’est passé est conforme à une promesse électorale de M. Biya ;
c’est l’utilisation de l’administration pour consolider un pouvoir qui ne
rêve que de s’éterniser; en effet, si Biya envisageait de quitter le pouvoir en
2011 comme le recommandent le bon sens et l’intérêt général, on ne voit pas pourquoi il aurait cédé aux revendications
régionalistes des députés ; bafouant ainsi la loi, et surtout la
Constitution de la République. M. Biya a résolu son problème à lui, pas celui
des camerounais ; c’est ce qui explique que le nombre d’admis dépasse le
nombre réclamé par les députés.
A la faculté de
médecine de Buéa, on a relevé un recteur soit disant parce qu’il y avait trop
d’anglophones dans la liste d’admis; le ministre de l’enseignement
supérieur a corrigé la liste du recteur en y incluant les camerounais
originaires des provinces francophones ; au nom de l’équilibre
régional ; comme quoi, au Cameroun, les mêmes causes ne produisent pas les
mêmes effets ; qu’est donc devenue cette notion à Maroua ? Elle a été
rangée au placard, sacrifiée sur l’autel de la politique politicienne du régime.
Les
infrastructures ont été prévues pour recevoir 2500 étudiants environ ; on
se retrouve à plus de 5000 ; quelle sera la qualité de la formation ainsi
dispensée ? Les enseignants formés dans ces conditions seront-ils à la
hauteur ? On peut légitimement en douter.
Le trafic
d’influence des députés a ainsi été validé ; comment ont-ils constitué
leurs listes ? Auraient-ils été admis si on avait organisé un concours
normal ? Comment peut-on autoriser à des élus à constituer des listes sur
des bases forcément subjectives et les imposent ?
Le
problème de l’ENS de Maroua est une conséquence de la gabegie, de l’impéritie
et de l’inconséquence qui caractérisent la gestion de nos ressources depuis les
indépendances ; le problème a été mal posé, et quand un problème est mal
posé, la solution est nécessairement mauvaise ; cette prétendue solution
va soulever d’autres problèmes qui vont compliquer davantage la situation. La pénurie des enseignants dans
le Grand Nord résulte de la mauvaise gestion de nos ressources par un régime
que la majorité des députés qui manifestaient soutiennent ; on ne peut pas
avoir le beurre et l’argent du beurre ; notre pays a besoin d’être bien
gouverné par des patriotes, démocratiquement élus, ce qui est loin d’être le cas.
301208
Tchassé jean-claude
PLEG,
Syndicaliste
Tel :
77134916/33045643
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