TRANSPARENCE
ELECTORALE :
De quoi a peur le régime RDPC ?
Cet
article a été écrit en décembre 2006
Manifestement ils n’avaient pas
l’intention de faire adopter les lois sur les élections en ce mois de décembre
2006 : qu’il ait fallu convoquer une session extraordinaire du parlement pour
cela, quelques jours seulement après la fin de la session ordinaire à laquelle
les projets de lois y relatifs auraient dû être examinés, est significatif à
cet égard. De quoi ont peur M. Biya et son parti ? Voilà un régime qui prétend
avoir remporté toutes les élections organisées dans notre pays depuis
l’ouverture démocratique en 1991, un régime qui vient de fêter 24 ans au
pouvoir, et qui multiplie pourtant les artifices pour éviter, pour renvoyer
sine die les élections transparentes, que les camerounais appellent de tous
leurs vœux et pour laquelle les bailleurs de fonds internationaux semble faire
pression sur le régime. Toutes les consultations électorales organisées
jusqu’ici dans notre pays ont été décriées, ou alors elles ont été boycottées. Rappelez-vous
qu’en 1992 M. Biya lui-même est venu à la Télévision nationale corrompre les
partis politiques qui boudaient, en leur proposant 500. 000.000 (excusez du
peu), pour les inciter à participer aux élections anticipées qu’il avait
organisées en réponse à la forte contestation dont lui et son régime étaient
alors l’objet ; ceci suivait le rejet par le régime de la Conférence Nationale
Souveraine à laquelle le régime avait substitué la fameuse tripartite,
assemblée bâtarde, sans pouvoir, contrôlée par le régime, et qui avait l’énorme
avantage de ne présenter aucun danger pour des personnes dont la seule
préoccupation est le maintien au pouvoir par tous les moyens imaginables. Un
parti qui dit compter dans ses rangs tous les plus grands hommes d’affaires,
tous les chefs traditionnels, tous les hauts fonctionnaires, on voit même des
organisations de jeunes qui se réclament de ce parti ; un parti qui maîtrise
les rouages de l’administration, qui nous dit souvent qu’il a l’expérience du
pouvoir, qui a de son côté, l’armée, la police, la justice ; comment un tel
parti peut-il avoir peur des élections ? C’est curieux non ? Le régime a peur ;
et pour cause : l’état des lieux n’est pas particulièrement réjouissant.
L’économie camerounaise est marquée par un faible taux de croissance,
l’inflation, les salaires des fonctionnaires bloqués sans raison valable et
surtout sans négociations avec les organisations de travailleurs ; l’initiative
privée, qui devrait être une source d’emplois pour les jeunes est découragée
par un harcèlement fiscal injustifiable ; la corruption, le péculat, sont
encouragés par l’impunité. Les camerounais souffrent alors que certains d’entre
eux financent l’économie des autres pays avec les milliards qu’ils nous ont
volés, et M. Biya ne semble pas pressé de faire ramener ces sommes. Notre
jeunesse est sans avenir, sans perspectives, obligée de fuir le pays, etc.
Comment expliquer que M. Biya, âgé de 73 ans aujourd’hui, et qui a passé 24 ans
au pouvoir s’y accroche éperdument, lui qui devrait songer sérieusement à
quitter la scène par la grande porte ? Faut-il comprendre qu’il ne songe pas à
prendre une retraite bien méritée ? Où attend-il d’apporter la prospérité qu’il
n’a pas su créer en 24 ans ? L’Eglise catholique a fait des propositions
sérieuses, auxquelles ont contribué les partis politiques, les associations de
la société civile, les administrations, etc. Pourquoi le régime les
rejette-t-il ?
Objectifs
inavouables des consultations
À quoi ont servi les consultations
organisées dans la précipitation par le Premier Ministre Inoni ? Qu’en est-il
sorti ? Et du reste, quelles sont ces drôles de consultations où on vous
appelle la veille, sans vous laisser le temps de vous préparer, où il vous est
demandé de faire des propositions sur un sujet aussi sérieux que les élections?
Le pouvoir se réserve évidemment la possibilité de gérer comme bon lui semble,
selon ses propres convenances, les éventuelles propositions faites ; cela
ressemble au fameux « large débat » par fax et téléphone organisé autour de la
Constitution en 1993 d’où est sorti un texte dont on se demande si c’est une
nouvelle Constitution ou s’il s’agit juste d’une loi portant révision de la
Constitution de 1972, et qui, après 10 ans attends toujours d’être appliqué
dans toutes ses dispositions. ( article 66 sur a déclaration des biens, la
décentralisation, etc). D’autre part, sur quels critères les associations
convoquées ont – elles été choisies ? Les chefs traditionnels par exemple ont
toujours été les alliés du pouvoir ; ceux d’entre eux qui manifestent des
velléités d’indépendance d’esprit sont déposés ou éliminés ; l’on se souvient
du grossier montage de 1992, digne de l’ère du parti unique, où l’on a vu une
délégation de chefs traditionnels de l’Ouest aller demander à M. Biya de
présenter sa candidature aux élections présidentielles, comme s’il n’était pas
intéressé ; il s’agissait de faire croire que c’étaient les populations de
l’Ouest qui sollicitaient la candidature de M. Biya, alors que celles – ci n’avaient
à aucun moment été consultées par ces monarques, qui par leur engagement
politique en faveur du parti au pouvoir ont vu leur autorité sérieusement
entamée. Il n’est donc pas surprenant qu’au sortir de l’immeuble étoile
certains d’entre eux (le Chef Ewondo et le Chef Bakweri) se soient interrogés
sur l’opportunité de l’indépendance de l’organe à créer. Les autorités
connaissent certainement les vrais résultats de toutes les élections organisées
jusqu’ici au Cameroun, et selon lesquelles ce n’étaient que des parties de «
qui perd gagne » ; elles savent donc que les chiffres officiels étaient faux,
malgré les tripatouillages honteux observés.
Légitimité
problématique
La question de la légitimité de ce
régime se pose ; et quand un régime n’est pas légitime, quand il se cramponne
au pouvoir par des moyens inavouables et condamnables, on ne peut espérer
l’adhésion des populations à sa politique. A défaut d’utiliser les canaux
d’expression connus tels les manifestations, les grèves, ils recourent à
d’autres moyens plus pernicieux pour exprimer leur désapprobation; le refus non
exprimé d’adhérer à la politique des gouvernants, qui se traduit par la
corruption, la concussion, la gabegie les détournements. Ceux qui soutiennent
le régime ne le font nullement par conviction, mais dans l’espoir d’avoir les
possibilités de voler, de piller, de se servir. Le refus d’élections
transparentes est un crime contre le peuple ; c’est la confirmation de la
séquestration de la souveraineté du peuple par un régime, qui s’est retourné
contre le peuple pour le prendre en otage, ne lui permettant pas de s’exprimer.
Le régime sait que le jour où les camerounais pourront se prononcer librement,
ils seront balayés. Le virus de la fraude électorale a été introduit par les
français, qui ont commencé dès les premières élections organisées au Cameroun à
combattre les upécistes et à favoriser les candidats favorables aux thèses
françaises, ou anticommunistes déclarés ; Guy Georgy, administrateur colonial
français déclare ainsi qu’ils ont mis des paquets de bulletins dans les urnes
pour favoriser le candidat Ahidjo en 1956, lors des élections au Nord Cameroun.
Il est révélateur que des leaders tels que UM Nyobé, Félix Moumié, Ernest
Ouandié, n’aient jamais siégé dans une assemblée élue, qu’il s’agisse de
l’ARCAM (Assemblée Représentative du Cameroun), de l’ATCAM(Assemblée
Territoriale du Cameroun), ou de l’ALCAM(Assemblée Législative du Cameroun). Ce
régime n’acceptera jamais de bon gré de perdre le contrôle du processus
électoral ; la seule idée de devoir un jour rendre compte devant une justice
indépendante et équitable des exactions dont ils se sont rendus coupables
pendant leurs années au pouvoir suffit à les dissuader, à les encourager à
s’opposer à toute évolution vers des élections transparentes.
201206
TCHASSE
JEAN – CLAUDE PLEG, Syndicaliste
Tel
677134916
tchasse_jclaude@yahoo.fr
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