lundi 7 septembre 2015

Vous avez dit "Cours de répétition?"




La répétition en question


Le phénomène de répétition tend à devenir de plus en plus la règle ; ce sont soit les enseignants qui l'imposent aux parents, soit les parents qui de leur propre initiative ou poussés par leurs enfants, sollicitent les enseignants pour cela. On peut se demander pourquoi cela tend à se généraliser ; les élèves d'aujourd'hui seraient-ils moins intelligents que ceux d'hier ? Ou alors l'école serait-elle devenue plus difficile ?

Avant d'essayer de répondre à ces questions il convient de préciser que les programmes scolaires devraient en principe être conçus pour des enfants normaux. Or les enfants sont généralement normaux à plus de 95 %. Un enfant à l'intelligence moyenne, inscrit à la Sil de l'école primaire à l'âge de six ans devrait pouvoir s'en sortir sans avoir besoin des cours de répétition. Le problème aujourd'hui, c'est que les enfants inscrits trop tôt à l'école, sans avoir ni les capacités, ni les aptitudes nécessaires, sans avoir atteint le stade de développement mental suffisant, ni acquis la maturité d'esprit indispensable, ont trop vite l'impression que l'école est dur, ils pensent qu'il faut fournir trop d'efforts pour comprendre, et ils développent par conséquent pour le restant de leur vie un complexe d'infériorité et d'incapacité par rapport à l'école ; leur rapport à l'école est vicié, des obstacles psychologiques ayant été installés dans leur subconscient.
D'autre part des enfants inscrits à l'âge normal se trouvent dans des conditions peu propices à leur évolution normale et à leur épanouissement ; parmi les obstacles rédhibitoires sur lesquels butent les élèves, on peut citer :
• les classes aux effectifs pléthoriques qui ne constituent pas un problème seulement pour les enseignants qui sont débordés, ce sont surtout les enfants qui en pâtissent parce qu'ils sont trop nombreux ; avec le chahut et l'impossibilité pour l'enseignant de suivre convenablement l'élève qui s'ensuivent ;
• un environnement malsain et pollué, d'où sont exclus l'esprit de saine émulation, le goût du travail bien fait et la recherche de l'excellence ; en effet, le nombre croissant de redoublants par classe, la reprise d'élèves exclus, souvent même autorisés à passer en classe supérieure, le passage en classe supérieure avec des moyennes inférieures à 10, sont autant de facteurs qui induisent nos élèves à penser que c'est plus naturel d'échouer que de réussir ; échouer ne constitue pas un drame irréparable, et la réussite est une exception. On aurait voulu mystifier la notion de réussite scolaire que l'on ne s'y serait pas pris autrement.
C'est dans cet atmosphère corrompu que la répétition apparaît pour certains comme une planche de salut. Seulement, pour certains enseignants, c'est le moyen de joindre les deux bouts ; c'est leur réponse à la marginalisation et à la clochardisation dont ils sont victimes ; ils font la répétition comme les infirmiers vendent les médicaments, ou comme les policiers et gendarmes rançonnent les transporteurs. Les répétitions devraient être des cours particuliers, or il se trouve que des enseignants transforment des chambres de leurs domiciles en autant de salles de classes, quand les cours ne se font pas carrément dans les salles de classes habituelles ; les cours ne sont plus particuliers dans ces conditions, et leur efficacité est sujette à caution ; cela ne profite en réalité ni à l'enseignant, ni à l'élève ; l'enseignant consacre à ces cours le temps qu'il aurait dû passer à se reposer, à faire des recherches en vue d'améliorer ses méthodes pédagogiques, la préparation de ses leçons ; la correction normale des copies ; sa prestation s'en ressent par conséquent et il ne peut pas être aussi efficace qu'il aurait dû l'être s'il ne faisait pas des cours de répétition ; s'il faut ajouter à cela des activités telles que le commerce, l'agriculture, le transport clandestin et d'autres activités plus ou moins louches, on comprend que le rendement de l'enseignant ne peut que souffrir de cette lutte pour la survie.
Quant à l'élève, il doit être à la répétition à l'heure où il devrait se reposer, ou en train de donner un coup de main à ses parents ; il finit sa semaine épuisé et n'a pas suffisamment de temps à consacrer aux recherches personnelles ; il développe un sentiment de dépendance qui ne peut que lui être préjudiciable.
Les cours de répétition, c'est comme un médicament ; mal administré, il peut plutôt aggraver la maladie qu'il était censé soigner. Avis donc aux parents d'élèves, qui sont invités à faire preuve de plus de vigilance et de responsabilité.

 Tchasse Jean-Claude
Pleg, syndicaliste

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