Parodie électorale du 11 octobre 2004 au
cameroun:
l’avenir hypothéqué.
L
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e Cameroun vient de vivre une de
ces grosses farces dont le régime du renouveau a le secret, et que certains
veulent nous présenter, à coups de manipulations, de déformation, de désinformation,
de menaces, de mystifications, d’intimidations et de mensonges, aux frais du
contribuable, véritable dindon de la farce, comme une « élection
transparente, sincère et démocratique ». Monsieur Biya, principal maître
d’œuvre et bénéficiaire de cette parodie, de cette mise en scène grotesque
s’est même cru obligé de « remercier » ce pauvre peuple
camerounais pour qui il n’a que du mépris, pour la confiance à lui
accordée.
Le Pr Maurice
Kamto, naguère connu pour ses positions courageuses et progressistes,
s’appuyant sur la nature de l’arrêt rendu par la Cour Suprême statuant en
Conseil Constitutionnel, appelle à se tourner vers l’avenir, si nous
interprétons bien ses propos, objet d’un éditorial paru dans le journal
Mutations, édition du 27 octobre 2004. Comme s’il était possible d’envisager
sereinement cet avenir, comme si on pouvait faire abstraction de ce
gouvernement et des nombreux obstacles qu’il dresse sur le chemin de la
construction nationale, comme si on pouvait faire l’impasse en le cautionnant
et en l’endossant, sur le hold-up électoral dont le Cameroun vient d’être
victime. Tout cela prêterait à rire si tout le cirque qui vient de se jouer ne
prouve pas à quel point ceux qui dirigent le Cameroun ne sont préoccupés que
par le pouvoir pour le pouvoir, et par le pouvoir.
Quand un
régime peut ainsi s’imposer sans le consentement de la majorité, qu’est-ce qui
peut l’obliger à entreprendre les
réformes qui s’imposent ? c’est à l’occasion des élections démocratiques
que le peuple peut sanctionner les gouvernants, leur dire ce qu’il pense de
leur politique, les éconduire ou les reconduire ; mais au Cameroun les
gouvernants n’entendent pas perdre les élections ; il n’est pas question
qu’ils quittent le pouvoir, sous le prétexte d’avoir perdu. M. Biya ne quittera
le pouvoir que contraint et forcé.
L’exécutif au
Cameroun contrôle le pouvoir législatif et le pouvoir judiciaire ;
il n’y a pas séparation de pouvoirs, la souveraineté n’est pas détenue par le
peuple, ainsi que nous pouvons le constater, à l’issue du théâtre de mauvais
goût dont on vient de nous accabler.
Après s’être
moqué de nous, après nous avoir montré que notre opinion lui importe peu, M.
Biya prétend solliciter notre aide. Qu’il commence par déclarer des biens comme
le prévoit l’article 66 de la Constitution de la République, qu’il fasse preuve
d’un peu de diligence et de bonne volonté dans la mise en place des
institutions prévues dans la Constitution de 1996. Au fait pourquoi y a t-il
deux constitutions au Cameroun ? c’est le règne de l’incertitude, du flou
artistique, et l’on peut relever que par des manœuvres, on a évité
l’indispensable consensus autour de la loi fondamentale, en torpillant le
comité mis en place à l’issue de la conférence tripartite, cet ersatz de conférence
nationale organisée au début des années 90.
Que peut M.
Biya contre la corruption ? Que propose-t-il ? Tous les comités crées
se sont avérés être de la poudre aux yeux, en raison du manque de volonté
réelle de combattre ce fléau. Le Cameroun, qui du reste n’a jamais quitté le
peloton de tête des pays les plus corrompus de la planète, va battre de
nouveaux records en la matière, au grand dam des populations qui vont davantage
s’enfoncer dans la misère matérielle et morale.
Et
l’impunité ? et le tribalisme ? Bien naïf celui qui croira M. Biya
capable de juguler ces maux ; j’aimerais bien me tromper, mais force est
de constater qu’en 22 ans de renouveau, nous n’avons eu droit qu’à des discours
démagogiques et incantatoires, sans effet réel sur ces calamités décriées de
tous.
Il convient de
remarquer que ceux-là même qui ont fait la campagne pour la réélection de M.
Biya sont les derniers à croire en sa capacité à apporter les solutions idoines
aux problèmes des camerounais ; ils ont été motivés tout simplement par
des batailles de positionnement autour de la mangeoire, sans aucun souci pour
l’intérêt général, et ils espèrent que la gabegie, le péculat, la corruption,
sous le couvert de l’impunité vont se poursuivre, et qu’ils vont en profiter au
maximum.
Des personnes
bien intentionnées, des patriotes, véritablement soucieux de l’avenir de ce
pays auraient-elles eu besoin de recourir à des artifices tels que de faux
observateurs, des pression de toutes sortes sur des hommes d’église,
etc… ? J’en doute.
On a vu des
chrétiens renier leur foi, administrer la preuve qu’ils ne croient pas un mot
de la profession de foi qu’ils récitent tous les dimanches, on a vu des cadres
se compromettre, aller au village tromper les grand-mères, on a vu des
personnes apparemment respectables dire des choses dont ils ne croyaient pas un
seul mot.
Le peuple qui
était déjà désabusé en sort davantage frustré et davantage dégoûté de la
politique.
L’administration
camerounaise, fidèle à elle même, est restée campée sur ses positions partiales
et subjectives, au nom de la carrière à sauvegarder, au détriment du
peuple ; la plupart de ses cadres se sont résolument mouillés, au propre
comme au figuré, pour faire « gagner » par tous les moyens celui à qui ils doivent
leurs précieux postes avec de gros budgets à gérer malhonnêtement et en toute
impunité, acquis à coups de compromission, de reniement de soi.
Le scrutin du
11 octobre 2004 a aboutit au maintien au pouvoir d’un régime dont les ressorts
autocratiques ne sont un mystère pour personne, peu préoccupé de justice
sociale, qui constitue un obstacle rédhibitoire au progrès du Cameroun, et qui
curieusement bénéficie de l’indifférence de la communauté internationale. Qu’a
donc fait Saddam Hussein pour se faire bouter hors de son palais par les
troupes américaines ?
L’intérêt et
la finalité de cet exercice, qui était une contrefaçon d’élections
démocratiques, demeure peu évident. Ceux qui ont estimé que cela ne valait
pas la peine de se déranger en sortent renforcés dans leurs convictions. Cela a
servi de prétexte au gaspillage de nos maigres ressources, et aux énormes
détournements qui s’en suivent. Le moins que l’on puisse dire, c’est que
l’enjeu a tué le jeu, et il en a toujours été ainsi au Cameroun où n’ont jamais
été organisées de véritables élections démocratiques.
A quoi a servi
la participation de l’opposition à cet exercice dont l’issue n’était un mystère
pour personne ? S’il s’était agi pour eux de démontrer que le Gouvernement
est incapable d’organiser des élections démocratiques, ce n’était pas la peine.
Même s’il reste vrai que ceux des camerounais qui ont voulu et ont pu accomplir
leur devoir le jour du vote étaient mûs par l’espoir de voir les choses changer
à la tête de l’Etat camerounais. L’on aura quand même pu voir quelle était la
vraie opposition, du moins, celle capable de rassembler les foules ; on a
vécu un foisonnement d’idées, mêmes si certaines d’entre elles étaient plutôt
loufoques, et l’on aura surtout été
marqué par la duplicité, l’inconsistance et l’inconséquence d’individus douteux
qui obstruent le devant de la scène. On peut citer par exemple Célestin
Bédzigui, qui fait tousser la presse chaque fois qu’il s’enrhume, Antar
Gassagay, dont on pouvait se douter qu’il était un instrument di pouvoir, et
qui a quand même cheminé avec la fameuse coalition de l’opposition, Hameni
Bieleu qui a montré sa véritable dimension, etc… L’aventure sans lendemain de
Akame Mfoumou, ci-devant grand argentier national a montré que celui-ci était
prêt à jouer une carte personnelle contre son mentor.
L’alternance
par la voie des urnes est impossible au Cameroun, et l’on peut déjà prévoir que
les élections à venir, en particulier celles qui seront organisées dans le
cadre de la décentralisation ne nous feront pas avancer dans la voie de la
démocratie. Il s’agira pour la véritable opposition de ne plus avaliser ces
mascarades, de ne plus permettre au régime de se perpétuer en triomphant avec
gloire. Il est vrai que le régime trouvera
toujours une opposition factice pour donner le change, mais nul n’est
dupe. Parmi les seize « candidats » à la dernière élection tout le
monde sait qu’il n’y avait en réalité que trois candidats.
011104
TCHASSE JEAN-CLAUDE
PLEG, Syndicaliste
Tel : 7134916
e-mail : tchasse_jclaude@yahoo.fr
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