Attentats terroristes
de Paris. Gare à la confusion.
Le
13 novembre 2015 entrera dans l’Histoire comme une date où une série d’attentats
meurtriers ont été commis en plein Paris par trois équipes de djihadistes. Le
bilan, pas encore définitif, est très lourd : 129 morts, 352 blessés dont
99 dans un « état d’urgence ». Les autorités françaises ont été
obligées de déclarer l’état d’urgence, que ce pays n’avait plus connu depuis la
fin de la guerre d’Algérie en 1962. C’est dire donc le caractère exceptionnel
de cette situation, qui a poussé certains à dire que la France est en état de
guerre. Les victimes sont des civils de toutes nationalités. Le mode
opératoire, qui consiste pour des kamikazes munis de ceintures ou de gilets
d’explosifs, à se faire exploser au milieu d’une foule ou alors pour des
tireurs, qui débarquent dans un lieu très fréquenté, à tirer à la kalachnikov et
à l’aveuglette, ne fait pas de différence. Les victimes ne sont donc pas
seulement des français. Il vaut mieux en tout cas ne pas se retrouver sur leur
chemin. Cet attentat survient après celui du 07 janvier 2015 dans les locaux de
Charlie Hebdo, qui avait fait 11 morts.
Ces
terroristes ne sont pas des modèles de courage et de témérité ; les
kamikazes sont sous l’emprise de psychotropes, et les autres tirent sur des
personnes désarmées qu’ils surprennent dans des activités qui n’ont rien de belliqueux.
Pourquoi ne pas attaquer des bases militaires ? Pourquoi fuir après un tel
acte ? Pourquoi se cacher ? Ils doivent revendiquer leurs actes et se
constituer prisonniers ; c’est cela, la responsabilité. La lâcheté et la barbarie de ces
assaillants n’a d’égale que l’abjection et l’ignominie dont ont fait preuve les
européens dans leur entreprise coloniale. On se rappelle que le 15 novembre
1533 le conquistador Francisco Pizzaro entrait dans le Cuzco, la capitale de
l’empire Inca en Amérique du Sud. Cette entrée qui a conduit à la chute de cet
empire, avait été précédée par l’assassinat
par pure lâcheté, un an plus tôt de l’empereur inca Atahualpa ; cela
après avoir obtenu de lui une rançon mirifique. Peut-être que cette quasi
coïncidence de date (13 novembre 1533 et 15 novembre 2015) n’est pas fortuite.
Les
réactions sont diverses devant un tel carnage. Les uns dénoncent et condamnent
cet acte barbare et ignoble contre des civils innocents. D’autres cherchent à
justifier cet acte, il y en a qui l’approuvent, et d’autres encore qui
l’applaudissent même. Ceux qui approuvent l’acte peuvent se distinguer en
plusieurs catégories ; les uns sont
des pro-djihadistes ; ils souhaitent l’expansion de l’islam
fondamentaliste. Les autres en veulent aux blancs, ils disent que l’occident chrétien doit payer pour ses
nombreux crimes impunis contre les autres peuples. Les africains ont des récriminations contre la France en particulier.
A cause des exactions perpétrées par ce
pays en Afrique francophone pendant la colonisation et après
les indépendances. Cette catégorie de personnes qui approuvent les
attentats n’ont rien à voir avec les djihadistes. Certains se disent chrétiens,
d’autres se disent animistes, etc. donc la France n’est pas un enfant de chœur,
et elle n’a pas bonne presse dans ses « anciennes » colonies.
L’opinion n’arrive pas à digérer le rôle négatif qu’elle continue d’y jouer. Les pays qu’elle a colonisés et qui sont
dirigés par des régimes autocratiques, corrompus et incompétents ne se
distinguent ni par la démocratie, ni par le développement économique. Les
africains sont victimes aujourd’hui encore de ces régimes et se rappellent des
abus commis et de l’exploitation qui continue. L’Occident n’a jamais fait son mea culpa. On parle en ce moment du
dédommagement des victimes de la shoah. Certes, les juifs ont été gazés,
massacrés, torturés, persécutés par milliers. Mais ce n’est pas le seul peuple
à avoir souffert. Le peuple noir a subi l’esclavage pendant des siècles, il y a
eu la traite, la colonisation, et puis la fausse indépendance des années 1960.
Que dit-on de tout cela ? Pas grand-chose. Nos pays sont riches, mais ces
richesses continuent d’attirer des convoitises et de causer des guerres dont
nous souffrons. Ces ressources, qui
auraient dû permettre le développement économique de nos pays sont comme une
malédiction pour nous. Ce ressentiment est une réalité qu’il faudrait
prendre en compte.
De
l’autre côté les occidentaux sont
accusés d’avoir provoqué des guerres dans d’autres parties du Monde pour avoir
une main mise sur les richesses du sous-sol de ces pays, et pour vendre leurs
armes de guerre. On se souvient de l’intervention américaine en Irak en
2003, qui a abouti à la chute du régime de Saddam Hussein. L’Etat Islamique a
profité du chaos créé pour s’installer. Une bonne partie des armes de ISIS proviennent de l’armée irakienne vaincue. Il y
a ensuite eu la déstabilisation, en 2011 de la Libye par l’OTAN. Ils ont financé et armé des rebelles dans
certains pays et ce sont certains de ces rebelles qui se sont retournés contre
eux. En Syrie, les occidentaux soutiennent les rebelles, contre Assad et
sont en désaccord avec la Russie.
Ce
sont les pays occidentaux qui fabriquent les armes de plus en sophistiquées et
de plus en plus efficaces, donc de plus en plus en plus meurtrières. Quand on
fabrique une arme, c’est pour tuer des êtres humains ; quels sont donc
ceux qui vont être tués ? N’est-il pas un peu logique que les fabricants,
les vendeurs et autres trafiquants d’armes soient de temps en temps victimes de
leurs produits ? C’est une loi naturelle.
Mais
peut-on approuver le règne de la terreur ?
On ne peut poursuivre des
objectifs honorables et nobles par des moyens vils et méprisables. Daesh
(ISIS en Anglais), l’Etat Islamique, qui envoie ces terroristes mène une guerre
de religion et veut imposer un islam radical par la force à tous les pays du
monde. Et c’est une entreprise obscurantiste qui ne s’embarrasse ni de
scrupules, ni de considérations morales. Ils
n’agissent pas du tout au nom de tous les peuples dominés, opprimés et
exploités par l’occident. Il n’y a
aucune solidarité avec les victimes de la « mission civilisatrice » des
puissances européennes. Pas du tout. Les pays d’Afrique touchés par ces fanatiques
ne sont pas de l’occident chrétien. La
plupart des victimes des assassinats en Afrique (Mali, Tunisie, Egypte,
Niger, Nigéria, Tchad, Cameroun) sont
même des musulmans. Les djihadistes sont des déséquilibrés, des extrémistes
et des radicaux, intolérants, qui veulent imposer par la terreur, la violence,
la barbarie leur islam sunnite et son corollaire, la sharia, au reste du monde.
Leur ennemi n’est pas seulement
l’occident chrétien ; ce sont ceux qu’ils appellent des mécréants, les
infidèles, les non musulmans et les musulmans tièdes.
Au lieu d’approuver de tels actes, il
faut s’organiser pour dénoncer, pour rejeter et pour combattre la domination
française. C’est
même de la lâcheté, cette sorte de récupération de ces attentats. Ceux qui
condamnent ne sont pas capables de vous dire ce qu’ils font eux, pour contrer
l’attitude de la France. Ils attendent tranquillement que des attentats soient
commis pour les approuver. La domination et l’exploitation française perdure
parce que ces personnes ont démissionné et ne font rien.
Les
adeptes des théories du complot se signalent déjà. La France aurait organisé
elle-même ce complot pour justifier un acte qu’elle s’apprêterait à poser. Mais
elle intervient déjà en Syrie, aux côtés de la coalition contre l’état
islamique.
Répondre
à la violence par la violence peut-il permettre de résoudre les
problèmes ? Les attentats du World Trade Center en septembre 2001 ont été
spectaculaires ; ils ont peut être montré, comme les récentes attaques de
Paris, que tout système de sécurité,
aussi performant soit-il, peut avoir des failles. Mais quel résultat ont-ils
produit? Le régime des Talibans en Afghanistan a été balayé. La destruction de
la Lybie et le renversement de Saddam Hussein en Irak sont survenues après ces
attentats. Et puis c’est tout. Al Qaïda reste actif. Les occidentaux
soutiennent même Al Nosra, la branche syrienne de cette nébuleuse terroriste
contre Daesh. C’est très compliqué.
De toute
façon l’entreprise de Daesh et de ceux qui le soutiennent est vouée à l’échec. Que les royaumes et autres émirats qui
soutiennent cette aventure diabolique invitent les islamistes fondamentalistes
disséminés à travers le Monde à immigrer chez eux. Comme cela, ils
appliqueront leur fameuse sharia à eux-mêmes.
Le
monde reste divisé, avec d’un côté des pays puissants et de l’autre les pays
condamnés qui s’enfoncent davantage chaque jour dans la pauvreté sans pour
autant être pauvres. Les premiers
veulent garder leur position dominante en spoliant les autres. Cet état de fait
ne peut que engendrer et entretenir des frustrations et des ressentiments.
L’émigration clandestine est l’une des réponses. L’approbation par les victimes
des attentats est une autre réponse.
161115
Jean-Claude TCHASSE
Auteur, Essayiste.
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