lundi 31 août 2015

Le non de Sékou Touré à de Gaulle



Le non de Sékou Touré à de Gaulle

Article écrit en octobre 2008 

2 octobre 1958 – 2 octobre 2008 ; cela fait 50 ans que Sékou Touré a dit non à de Gaulle, ce Général français célèbre pour avoir dit non à l’Allemagne hitlérienne, en dénonçant la collaboration du régime de Vichy, dans son fameux appel de Londres ; la domination qui était mauvaise quand les français en étaient victimes devait être bonne pour les africains, car comment expliquer autrement la quête de l’indépendance par cette même France qui la refusait aux africains
Paradoxe, vous avez dit ? Il en est de l’indépendance comme de la démocratie. Jacques Chirac estimait que la démocratie n’était pas bonne pour les africains, alors qu’en France c’est un acquis inaliénable depuis la prise de la Bastille.


L’idée loufoque de communauté proposée par de Gaulle, était une parade ; ce Monsieur grand pour les français voulait louvoyer et retarder autant que possible l’accès à l’indépendance des colonies, c’est pour cela qu’il a inventé cette histoire pour maintenir ces colonies sous le giron français ; le non de Sékou Touré a été perçu comme un affront ; comme quoi, vous n’êtes pas libre de refuser ce que la France vous « propose ».
Les guinéens, et surtout Sékou Touré ont payé cher leur rejet de la communauté franco africaine ; les français ont créé chez Sékou une psychose des coups d’états, qui l’ont transformé en dictateur sanguinaire ; il faut dire que les coups d’état sont une marque déposée française, qui l’ont inventée pour mieux contrôler les pays africains, en veillant à ce que ceux-ci soient dirigés par des larbins à leur solde ; cela a commencé au Togo et les conditions de l’assassinat de Sylvanus Olympio par le triste Eyadéma Gnassingbé en sont une preuve plus qu’éloquente ; s’ils en avaient eu la possibilité, ils auraient fait assassiner le leader guinéen, comme ils l’on fait au Togo. Dans les autres colonies ce sont les dirigeants nationalistes qui étaient pris pour cibles, combattus et massacrés : le cas du Cameroun avec Um Nyobé lâchement abattu le 13 septembre 1958, c’est-à-dire peu avant le non de Sékou,  est un des nombreux exemples que l’on peut citer.

50 ans plus tard on se demande ce que l’acceptation de cette idée de communauté aura apporté aux autres états ; il serait bien de voir ce que sont devenus aujourd’hui les autres anciennes colonies françaises qui ont adhéré à l’idée de de Gaulle ; d’abord, on remarque qu’ils ont tous accédé à l’indépendance en 1960, soit deux ans plus tard ; c’est dire que l’idée même de la communauté n’a pas prospéré. Sékou Touré avait donc raison.
La Cote d’Ivoire dont le Président Houphouët Boigny était l’un des plus fervents partisans de la France est passée par la guerre civile. Ce pays aurait dû être un exemple de coopération réussie, dans la mesure où il a été pratiquement envahi par les coopérants français dans tous les domaines, et cela pendant plus de dix ans, puisqu’il a fallu attendre les années 70 pour commencer à parler d’ivoirisation des cadres. Ce pays comme les autres a été dirigé par la France : pour quel résultat ? Peut-on se demander en toute légitimité aujourd’hui. Les autres pays n’ont pas connu la guerre, mais leurs économies sont sinistrées par des taux de chômage élevés, par des taux de croissance faibles, par l’inflation. Les pays d’Europe ravagés par la guerre ont été reconstruits en moins de trois décennies ; ceux d’Asie du Sud-Est se sont développés en moins de 40 ans. Qu’a donc apporté la fameuse coopération française ? La Guinée a souffert du non de Sékou, mais les autres pays n’ont tiré aucun profit du oui de leurs dirigeants. Voilà une contradiction bien française.

L’immigration qui est aujourd’hui un grand problème pour la France, est en soi une preuve que la France a échoué ; elle a été efficace quand il s’agissait de réprimer la Guinée et Sékou Touré, mais a été incompétente pour élaborer une politique africaine pouvant promouvoir le développement des pays qui ont adhéré à son projet ; du reste la France souhaite-t-elle le développement des pays africains ? Elle aplus à perdre dans une telle évolution qu’à y gagner. Elle est à l’image de l’administration publique qu’elle a imposé à ses postcolonies ; plus prompte à réprimer, mais incompétente et absente, voire hostile quand il s’agit de soutenir les initiatives et les projets de développement ; nos polices politiques conseillées par les français étaient efficaces pour traquer les « subversifs » et autre opposants, mais inefficace et impuissante devant la montée de l’insécurité et la corruption ; les citoyens peuvent souffrir ; tant que le régime n’est pas inquiété, ce n’est pas un problème.

L’entreprise coloniale européenne en général et française en particulier, qui se poursuit du reste sous d’autres formes en ce XXIè siècle, n’a jamais eu des motivations philanthropiques ; elle est essentiellement intéressée, et vise l’exploitation et l’appropriation des ressources humaines et matérielles des colonies. Sékou avait mille fois raison de dire non à de Gaulle. Aucun pays épris de liberté ne pouvait sérieusement adhérer au projet français.
051008

TCHASSE JEAN-CLAUDE
PLEG, Syndicaliste
blog : http://fr.360.yahoo.com/kimalu2006">http://fr.360.yahoo.com/kimalu2006

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