Le chrétien et
la politique
La politique,
c’est la gestion de la cité, la gestion des affaires publiques. Ceux qui font
de la politique, du moins à un certain niveau, ont du pouvoir. Ils sont connus,
ils sont influents, ils sont traités avec honneur ; ils sont
matériellement comblés. Obnubilés par ces avantages, certains hommes politiques
s’accrochent au pouvoir et veulent y rester coûte que coûte, envers et contre
tous. C’est le cas des Chefs d’état, des souverains, des ministres, des
députés, des sénateurs et autres dignitaires. Les privilèges dont jouissent ces
acteurs de la politique excitent la convoitise de ceux pour qui la réussite
dans la vie se conjugue en termes de bien matériels, d’honneur, d’influence. Et
de telles personnes aveuglées par leurs ambitions, sont prêtes à tout pour
atteindre leurs objectifs. C’est pour cela que le monde de la politique est
régulièrement secoué par des scandales ; le parcours des hommes politiques
est tortueux. On a l’impression que le mensonge, la corruption, le vol, la
tricherie, la trahison voire le crime sont indispensables pour réussir en
politique. Le mensonge est l’un des moyens les plus utilisés en politique,
certains ont même défini la politique comme l’art de bien mentir ; bien
mentir, c’est savoir faire passer des faussetés pour la vérité, c’est savoir
paraître convaincant quand on dit des mensonges. On ment pour obtenir toujours plus de
mandats ; on trompe son électorat, on cache des vérités embarrassantes, on
salit son adversaire par des mensonges, bref on utilise le mensonge sous toutes
les formes possibles. Et il y a des officines spécialisés en la matière ;
ils se présentent comme des stratèges en communication et se disent capables de
faire apparaître comme blanc ce qui est en réalité noir, ou vice versa. La
manipulation, les manœuvres, les combines, les tripotages, les trafics, les
manigances, l’imposture, la désinformation, sont couramment utilisés.
Malheureusement pour cette engeance, Dieu reste le plus fort, et la vérité
finit toujours par s’imposer. D’abord, ils sont les premières victimes de leurs
mensonges ; ils sont entourés par des courtisans, ces hypocrites qui
comptent utiliser les méthodes abjectes faites d’intrigues, de flagornerie, de
mesquinerie, utilisées par leurs maîtres pour se faire une place au soleil. Ensuite,
les montages aussi subtils soient-ils finissent par être découverts, démontés,
et souvent dénoncés par ceux-là mêmes qui y ont contribué. On ne se moque pas
de Dieu. Et l’histoire de l’humanité nous donne de nombreux exemples de ces
manœuvres qui ont fini piteusement et ont laissé leurs auteurs dans la honte et
la confusion.
Une fois au
pouvoir, comment se comporte celui qui y a accédé par les moyens peu
recommandables décrits ci-dessus ? On sait que le pouvoir corrompt
déjà ; le détenteur qui était initialement bon va avoir tendance à devenir
mauvais. C’est pour cela qu’il y a des contre-pouvoirs qui doivent fonctionner
pour ramener le souverain à l’ordre. Empêcher les contre-pouvoirs de
fonctionner, les prendre en otage, les neutraliser est d’une irresponsabilité
inénarrable. Le souverain se trouve livré à lui-même ; son entourage n’étant
fait que de courtisans qui veulent tous lui plaire, afin de bénéficier de
toujours plus de faveurs, il n’y trouvera pas le regard indépendant, libre, détaché,
lucide, objectif et équilibré dont il a besoin. Seulement les moyens utilisés
pour conquérir le pouvoir donnent déjà une idée de la personnalité du prince,
et surtout donnent le ton de la façon dont les choses vont se passer. Une
personne vertueuse, une personne bien intentionnée, une personne ayant des
idées nobles et altruistes ne peut employer des moyens qui tiennent de
l’ignominie pour atteindre ses objectifs. Certains parlent parfois de stratégie,
qui consiste à cacher ses intentions, et le cas échéant à tromper ses
adversaires, comme ces proches collaborateurs, ces adjoints du khalife qui
veulent devenir khalife à la place du khalife, mais qui doivent rire avec et
parfois embrasser le khalife tout en cherchant par tous les moyens à renverser
le khalife. Les conséquences de ce comportement répréhensible sont dramatiques.
Cette politique
mauvaise et rebutante continue pourtant d’attirer les candidats; les postulants
semblent se bousculer au portillon. Comment peut-on soutenir ces souverains qui
ne se distinguent pas par leur attachement aux valeurs nobles et qui ont
sacrifié la rectitude et l’intégrité à l’autel de leur voracité insatiable? Il
me semble que les hommes accordent plus d’importance à l’honneur des hommes, et
si la loi divine est un obstacle, ils préfèrent la mettre entre parenthèses.
Les princes, bons ou mauvais sont des faiseurs de rois. Donc ceux qui les
soutiennent peuvent en retour obtenir quelques avantages, et même beaucoup
d’avantages. Ils peuvent obtenir que le potentat ne fasse pas d’eux des cibles
directes de leurs abus et de leurs excès. Selon eux, il vaut mieux être du côté
du plus fort. Ils pensent qu’il vaut mieux être dans les bonnes grâces d’un homme
puissant qu’on voit et qui leur fait des faveurs concrètes que de suivre les
commandements de Dieu qu’on ne voit pas, qui est lent à réagir, et dont on
doute peut-être même de l’existence. Après tout d’autres les ont précédés dans
cette voie et semblent prospérer.
Dans ces
conditions, un chrétien doit-il faire de la politique, ou alors peut-il faire
de la politique en restant propre ? On peut aussi se demander s’il faut
abandonner la politique à ceux qui la font sans moralité, qui donnent toujours
l’impression qu’il faut mettre Dieu de côté quand on fait de la politique. Pouvons-nous
être des créatures de Dieu et nous permettre de l’ignorer dans certaines de nos
activités ? En effet, telle qu’elle se pratique, la politique est une
activité détestable et condamnable. C’est un domaine où règnent l’immoralité et
le vice, où il n’y a de la place que pour les loups qui ne feront qu’une
bouchée des agneaux épris de vertu et de rectitude qui seraient mal inspirés de
s’y aventurer. Mais il convient de faire
preuve de discernement. Il faut distinguer le but noble de la politique des
moyens ignobles et sordides utilisés par certains intervenants. Et préciser que
ceux qui recourent à ces méthodes viles et basses ne sont finalement préoccupés
que par la poursuite de leurs intérêts personnels ; leurs ambitions sont
purement égoïstes, ils sont attirés uniquement par la couronne, les fastes et
les prérogatives du mandat politique pour ce qui est des élus, et non par les
charges et les servitudes y afférentes. Le
chrétien vit dans une société et peut être victime des mauvaises décisions et
des malversations des politiques. Une mauvaise politique peut conduire à la
guerre, ou à défaut, un manque ou une insuffisance d’infrastructures, à une
mauvaise gestion des ressources qui peut être préjudiciable au chrétien. Oui,
la cité doit être bien gérée et pour cela, il faut des personnes vertueuses, désintéressées,
moralement irréprochables, soucieuses de l’intérêt commun, capables de faire
preuve d’abnégation, de rectitude morale et d’intégrité, et prêtes le cas
échéant au sacrifice suprême pour leur pays, bref des patriotes convaincus. Le
chrétien est l’homme de la situation. Surtout dans les pays sous-développés qui
ont besoin de tirer le maximum de leurs ressources. Mais il semble que les
loups ont pris en otage l’espace politique, et ne cooptent que leurs
semblables, qui sont des personnes corrompues et compromises.
J’ai été surpris
par la déclaration de M. Obama, Président des États-Unis, à la suite du
massacre de Charleston, dans laquelle il déplorait la circulation anarchique
des armes dans son pays. Après deux mandats à la Présidence, il n’a pas été
capable de faire passer une loi qui aurait permis de mieux contrôler la
distribution de ces engins de mort. Alors qu’il est présenté comme l’homme le puissant
du monde. Ce sont les américains qui aiment les armes, ou ce sont les
fabricants regroupés dans de puissants lobbies qui imposent leur volonté à la
majorité ? Difficile à dire. Il y a aussi eu le problème du mariage des
personnes de même sexe. M. Obama y était opposé quand il devenait Président ;
on aurait pu penser qu’il pèserait de tout son poids pour rendre illégale cette
pratique condamnée par Dieu, et qui constitue une menace sérieuse pour l’espèce
humaine. Mais au lieu de cela, il s’est
rangé et s’est mis à soutenir cette chose détestable. Voilà deux cas qui à mon avis illustrent
l’obligation des hommes politiques à se compromettre, à s’accommoder à des
situations et à tolérer des choses qui heurtent leurs convictions. Et cela se
passe dans les pays dits démocratiques.