jeudi 29 septembre 2016

Les palmes académiques : de la poudre aux yeux ?

Les palmes académiques : de la poudre aux yeux ?
Le 05 octobre prochain, à l’occasion de la 22è Journée Mondiale des Enseignants (JME), les enseignants sélectionnés parmi ceux qui en ont fait la demande avec les dossiers complets se verront attribuer ces palmes. Ce sera la deuxième cuvée de récipiendaires de ce qu’on veut bien nous présenter comme une distinction honorifique. Mais ces palmes académiques constituent-elles une bonne réponse aux problèmes et autres revendications légitimes de l’enseignant au Cameroun ? Peut-on prétendre qu’avec l’attribution de ces palmes, la situation de l’enseignant s’en est trouvée un tant soit peu améliorée ? Ces médailles ont-elles contribué à changer la perception que la société a de l’enseignant au Cameroun ?

Il faut dire que ces palmes font partie, avec le nouvel échelonnement indiciaire, le profil de carrière, la revalorisation des primes,  le congé sabbatique, des promesses faites dans le décret 2000/359 du 05 décembre 2000 portant statut des enseignants. Cela va faire bientôt 16 ans que les concernés attendent vainement leur concrétisation. Des décrets qui « promettent », c’est-à-dire avec des dispositions avantageuses, mais dont l’application est renvoyée sine die sont une spécificité bien camerounaise, traduisant une mode de gouvernance qui n’hésite pas à recourir à la roublardise, à la tromperie, à la morgue et à la condescendance.  Force est de constater qu’à ce jour, les autres promesses sont tombées dans les oubliettes. Les syndicats d’enseignants ont été tournés en bourrique dans des échanges qui se sont terminés en queue de poisson, et pour cause ! Ce n’était que du dilatoire. Le Gouvernement n’avait qu’une seule préoccupation : donner le change, faire croire à l’opinion internationale surtout, qu’on « négocie » avec les syndicats. Cela fait bonne presse, non ? L’on ne peut s’empêcher néanmoins de s’étonner que des méthodes aussi peu honorables aient pu être employées. En fin de compte, c’est la respectabilité et l’autorité des gouvernants qui en prend un sacré coup.
Ainsi, à la place de solutions négociées et durables aux vrais problèmes,  le Gouvernement préfère attribuer des palmes sans substance, parce qu’elles se réduisent à une médaille (vous avez dit la médaille de Meka ?) que l’on accroche à la poitrine des récipiendaires le 05 octobre, et puis, c’est tout. Cela s’arrête là. Aucune incidence financière n’est signalée. Dans les entreprises, les médailles du travail sont accompagnées d’allocations financières conséquentes. Dans ce cas, ce sont les récipiendaires qui doivent encore se saigner pour organiser des fêtes. Le décret 2014/003 du 16 janvier 2014 fixant les modalités d’attribution des palmes académiques « promet » en son article 4.2 un arrêté du Premier Ministre qui va définir les caractéristiques de ces palmes académiques. Ces caractéristiques comprennent certainement les « vrais » avantages liés aux palmes. Cet arrêté existe-t-il ? Le diplôme prévu à l’article 14 attend un texte particulier qui va préciser ses formes et ses caractéristiques. C’est le stratagème éculé et bien connu des textes d’application qu’on attend et qui n’arrivent jamais, mais que l’on tente maladroitement d’invoquer pour justifier le refus d’appliquer les dispositions avantageuses des textes pourtant en vigueur. On dirait qu’il existe une autorité supérieure au tout puissant Président de la République capable de le faire attendre quand il s’agit d’octroyer les maigres avantages prévus aux enseignants ! On se demande comment cela se passe dans l’Armée avec ces nombreuses médailles qu’arborent fièrement et avec ostentation nos officiers lors des cérémonies. Il faut se le dire, toutes ces manœuvres sont de vaines et risibles tentatives pour dissimuler une réalité évidente pour tout esprit lucide et objectif : l’amélioration des conditions de vie et de travail des enseignants est la dernière des préoccupations de ce Gouvernement. Ils ont été les agneaux du sacrifice : principale cible des mesures draconiennes imposées par les institutions de Bretton Woods dans le cadre du Plan d’ajustement structurel, ils ont été oubliés quand notre pays a atteint le point d’achèvement, qui a eu pour conséquence l’allègement substantiel de notre dette extérieure.
D’autre part, ces palmes, auxquelles on ne peut prétendre avant d’avoir fait 15 ans de service effectif, comportent trois grades : le grade de chevalier, celui d’officier auquel ne peut prétendre le titulaire du grade de chevalier qu’après cinq ans, et le grade de commandeur qui ne peut être attribué à l’officier qu’après 25 ans de service. Que feront donc les chevaliers proches de la retraite ? Seront-ils jamais élevés au grade de commandeur ? Une dérogation ne devrait-elle pas être accordée au personnel ayant déjà fait plus de 25 ans de service, pour leur permettre d’atteindre les grades de d’officier et de commandeur avant d’aller en retraite ? Pourquoi a-t-il fallu attendre 15 ans pour commencer à attribuer ces palmes ? Vous avez dit condescendance ?
L’on est surpris dans ces conditions de voir l’engouement manifesté par certains enseignants pour ces palmes réduites à une breloque.  Le nombre de demandes est passé de 1539 en 2015 à 2467 en 2016. La médaille exercerait un effet magique sur certains et ils seraient heureux de l’afficher sur leur poitrine. Seraient-ils éblouis par les circonstances de l’attribution de la médaille ? Est-ce un moment d’évasion où l’on oublie les avanies habituelles ? Certains y tiennent et se croient même obligés de donner dans du trafic d’influence en se faisant pistonner pour ce colifichet.
D’autre part on se demande si tous les récipiendaires remplissent effectivement les conditions énoncées dans l’article 6 du décret 2014/0003 du 16 janvier 2014. Je ne serais pas surpris qu’il y ait une certaine complaisance : le Conseil National d’Attribution ne serait pas trop regardant sur les conditions, puisqu’il s’agit de mener les enseignants en bateau en leur faisant oublier leur triste condition, l’instant d’une cérémonie.
Faut-il rappeler ces autres problèmes sérieux, obstacles rédhibitoires à l’exercice de la profession, mais qui restent royalement ignorés, et sans promesse de solution dans un avenir immédiat ? Sans être exhaustif, on peut citer :
Le faible niveau de traitement salarial des enseignants : en effet un bas niveau de salaire est imposé, en violation des textes en vigueur et des conventions internationales. En fin de carrière, l’enseignant, haut cadre ayant gravi tous les échelons et qui n’a pas été nommé, est confronté à de nombreuses difficultés. La nomination apparaît dans ces conditions comme une planche de salut. D’où tous les trafics observés : corruption, achat de consciences, compromissions, favoritisme, népotisme, clientélisme, etc. Vous entendrez beaucoup déclarer qu’il faut « chercher » les postes de proviseurs, de grands lycées de préférence, pour entre autres, « placer » les enfants dans les grandes écoles, grâce aux  avantages que ces postes procurent. Et si l’actuel Ministre des Enseignements Secondaires veut réellement mettre fin aux pratiques détestables qui ont fait leur lit dans ce département, il doit faire revoir par sa hiérarchie à la hausse ces salaires, en impliquant les représentants des enseignants dans la démarche.
La discrimination salariale : à indice égal, l’enseignant a un salaire inférieur à celui du magistrat ou du militaire.  Et l’écart est grand ; il dépasse cent mille francs pour certaines catégories. Cette différence de traitement, cette inégalité devant les charges et les sacrifices est inadmissible, puisqu’elle n’a aucune justification, aucun fondement légal. Mais à qui le dites-vous, à des autorités imbues de leur invulnérabilité, et qui appliquent la loi de manière fantaisiste, capricieuse et imprévisible? Elles n’en ont cure.
L’extrême lenteur des procédures judiciaires : les recours peuvent faire jusqu’à 15 (je dis bien quinze) ans sans être enrôlés. C’est un déni de justice de fait, qui encourage les abus d’autorité et les excès de pouvoir de toutes sortes.
Les enseignants du primaire ne sont pas intégrés dans la Fonction publique ; ils sont contractualisés, ce qui les pénalise énormément sur le plan salarial. Il n’existe pas de convention collective dans le privé, et les titulaires de CAPIEMP ont parfois des salaires qui atteignent à peine le SMIG.
Les conditions de travail ne sont pas négociées : qu’il s’agisse des affectations ou des nominations, on leur brandit le pouvoir discrétionnaire qui sert de prétexte à toute sorte d’abus et d’exactions. La mauvaise gestion du personnel avec de nombreux enseignants fictifs, qui perçoivent des salaires et des avantages qui auraient pu être redistribués aux actifs.
La politisation de l’école : certains élus et autres membres des instances dirigeantes d’un certain parti sont très actifs, pour soutenir des personnels au profil douteux et surtout non conforme, qui sont promus à des fonctions qui les dépassent manifestement, pour faire créer des établissements scolaires sans aucun respect des spécifications techniques, et qui s’avèrent peu viables par la suite, pour faire recruter par dizaines des élèves dans les établissements. Ce qui est curieux, c’est que ces malversations sont restées sans conséquences négatives pour leurs auteurs ; toute cette engeance peut continuer, en toute impunité, à nuire à notre école, à saper les efforts des personnes qui veulent bien faire, sans inquiétude. Les organes de gestions de la Fonction publique, par lesquelles doivent passer les sanctions sérieuses n’existent pas. La procédure disciplinaire a été pour ainsi dire désactivée. On est véritablement dans une cour du Roi Pétaud où tout est permis.
Les enseignants frais émoulus de l’Ecole Normale doivent attendre jusqu’à trois ans pour certains d’entre eux pour avoir leur traitement salarial, en dépit d’une « promesse » faite dans le décret 88/1328 du 28 septembre 1988 portant organisation, régime des études et statut de l’École Normale Supérieure dont l’article 54 prévoyait l’institution d’une bourse indiciaire pour les étudiants. Voilà bientôt 30 ans que cette promesse est ignorée. Comment peut-on priver un travailleur de son salaire, tout en exigeant qu’il soit assidu et ponctuel ? De telles absurdités ne peuvent être possibles qu’au Cameroun.
Les autres primes et avantages sont arbitrairement retenus ; on peut citer pêle-mêle, les primes d’Animateur pédagogique, les dépenses de santé non remboursées, les allocations familiales, les frais de déplacement, les frais de mission, les indemnités aux examens officiels, etc.
Les avancements sont bloqués sans raison valable.

Le journal L’œil du sahel du 26 septembre signale que 538 enseignants du secteur public sont portés disparus dans l’Extrême-Nord et que le déficit en enseignants pour cette région est de 4200. Ce problème qui semble éternel ne se poserait pas si les problèmes ci-dessus étaient résolus. En outre si l’on reconnaissait l’existence des zones d’éducation difficile (ZED), les mesures incitatives suivantes seraient prises : séjour obligatoire, et pour une durée déterminée (3 ans par exemple) pour tous les enseignants dans ces zones, une prime ZED, ajoutée dès la prise de service sans démarches particulières, le paiement effectif des frais de relève pour les déplacements temporaires (congés) et les déplacements définitifs. Malheureusement, ceux qui y sont affectés sont abandonnés et oubliés, et l’arme de l’affectation disciplinaire, bien qu’illégale, continue d’être suspendue, telle une épée de Damoclès sur la tête des indociles et autres récalcitrants.

Mais faut-il plaindre l’enseignant outre mesure ? N’a-t-il pas sa responsabilité dans ce qui lui arrive ? C’est en effet une victime consentante, qui va à l’abattoir tel un agneau alors qu’il a un avantage inestimable : le nombre. Voilà une foule qui ne sait pas faire foule. Les enseignants boudent l’action syndicale, qui bien menée aurait pu contribuer de façon significative à améliorer sa situation. Le jeune enseignant sorti d’Ecole n’a qu’une seule ambition : se faire nommer au plus vite. C’est une mauvaise solution à un vrai problème et ce ne sont pas les festivités du 05 octobre qui vont faire évoluer positivement la situation.

250916
Jean-Claude TCHASSE
PLESG Hors Echelle
jctchasse.blogspot.com

lundi 12 septembre 2016

Article sur Um Nyobé

Ruben Um Nyobè, secrétaire général de l'Union des Populations du Cameroun (1913-1958)
(05/06/2007)


Ruben Um Nyobè est né aux alentours de l’année 1913 à Song Mpèk, un village situé près de Boumnyébel, au cœur du pays bassa, dans le département de la Sanaga Maritime au Cameroun.


Par Paul Yange




Enfance et formation de Ruben Um Nyobè   Ruben Um Nyobè est né aux alentours de l’année 1913 à Song Mpèk, un village situé près de Boumnyébel, au cœur du pays bassa, dans le département de la Sanaga Maritime au Cameroun. Il est issu d’une famille modeste. Son père, Nyobè Nsounga, et sa mère, Ngo Um Nonos, sont cultivateurs. Ruben Um Nyobè grandit dans son village où il subit d’abord l’influence de l’éducation traditionnelle (son père est aussi grand prêtre des sociétés initiatiques Basaa), puis de l’éducation chrétienne, puisqu’il fait de bonnes études primaires (pendant une dizaine d’années) chez les missionnaires protestants, avant d’être reçu en 1931 au concours de l’école normale de Foulassi, près de Sangmelima dans le sud du Cameroun.   Mais il en est renvoyé en 1932 pour indiscipline raison d’un conflit avec les enseignants de la mission presbytérienne américaine. Il se présente néanmoins en candidat libre à l’examen de "moniteur indigène", est admis, et commence une carrière d’enseignant. Puis en 1935, il commence à travailler comme employé au sein de l’administration des finances à Douala, mais continue parallèlement ses études et obtient en 1939 le baccalauréat première partie.  "Peu de mouvements révolutionnaires africains auront eu un chef de sa valeur" Georges Chaffard
 Syndicalisme, politique et naissance de l'UPC, parti de Um Nyobè   Il trouve cette année là un emploi de commis greffier au tribunal de Yaoundé, puis est affecté à Edéa, où il passe deux années avant d’être affecté en 1947 le Nord (Maroua, Ngaoundéré). En juin 1949, placé en position de disponibilité renouvelable, il se consacre à plein temps à l’activité syndicale.   Um s’est initié au syndicalisme sous l’égide de deux fonctionnaires français appartenant à la CGT (Confédération Générale du Travail), MM Donnat et Soulier, en compagnie de Charles Assalé (futur premier ministre du Cameroun oriental) et Jacques Ngom, futur secrétaire de la CGT camerounaise. Dans un premier temps au sein de la JEUCAFRA (Jeunesse Camerounaise Française, créée en 1939, puis au sein du RACAM (Rassemblement Camerounais) en 1947, un mouvement qui a pour but de « travailler à la constitution future de l’Etat camerounais »). Les jeunes camerounais vont à tour de rôle à Paris suivre un stage de perfectionnement auprès de la centrale ouvrière française. Um Nyobè se fait remarquer par son ardeur et sa compétence et est élu premier secrétaire de la CGT camerounaise.   "A la différence de Fanon, Nkrumah, Nyerere, cet homme venu du village n’est pas allé dans les universités occidentales. Mais il est sorti des meilleurs lieux de formation que lui offrait à l’époque, son pays" Achille Mbembe   Il vient à la politique via le syndicalisme. Dans son enfance, il a été témoin de crimes coloniaux qui l’ont marqué tels que la mobilisation et de la réquisition des populations, les travaux forcés auxquels étaient soumis les adultes, bref des aspects sombres de la présence coloniale au Cameroun. Ce sont autant de facteurs qui contribuent également à accentuer son désir d’entrer en politique. Um écrira plus tard : "la colonisation, c’est l’esclavage ; c’est l’asservissement des peuples par un groupe d’individus dont le rôle consiste à exploiter les richesses et les hommes des peuples asservis".    La branche camerounaise du Rassemblement Démocratique Africain d'Houphouët   En 1946, suite aux principes énoncés lors de la conférence de Brazzaville, le Cameroun peut élire deux députés à l’assemblée nationale française. Ce seront le Docteur Louis-Paul Aujoulat, et le prince Alexandre Douala Manga Bell. Mais pour les militants de la CGT camerounaise, ces deux individus (un blanc « étranger » et un « aristocrate camerounais occidentalisé » ne sont guère représentatifs du peuple). Um qui est officiellement membre de la CGT depuis 1947 entend transformer le nationalisme diffus en structure organisée.  En tant que secrétaire général de l’USCC (Union des Syndicats Confédérés du Cameroun) il se rend à Abidjan, en 1947 au premier congrès du RDA (Rassemblement Démocratique Africain), un parti interterritorial en Afrique francophone, créé en 1946 dans le but de rassembler les hommes politiques africains de tout bord et mieux faire entendre leur voix. Le RDA a pour leader Félix Houphouët Boigny. Le 10 avril 1948 à Douala est créée l’UPC (Union des Populations du Cameroun), dirigé quelques temps par Leonard Bouli, avant que Um Nyobè n’en soit élu secrétaire général. Les symboles de l’UPC seront un drapeau rouge sur lequel est dessiné un crabe noir. Le rouge fait référence aux patriotes qui ont versé leur sang pour une cause juste, le crabe fait référence à la réunion exigée par l’UPC du "Kamerun" (écrit avec un K), divisé par la colonisation. Le Noir symbolise la couleur de l’Afrique Noire, continent où vit la population du Cameroun.    
  ©Houphouët-Boigny et François Mitterrand
Dès le début, l’UPC inscrit dans ses objectifs la constitution de la nation camerounaise et la levée de la tutelle exercée par la France sur le Cameroun (le Cameroun est alors un territoire sous mandat dont la tutelle a été confiée à la France par les Nations-Unies). Le parti devient la branche camerounaise du RDA. Um Nyobè deviendra un des vice-présidents du RDA en 1949.   Mais à la différence du RDA qui finit par choisir de coopérer avec l’administration, l’UPC si l’on peut dire se « radicalise », et refuse de suivre la voie du parti d’Houphouët Boigny et ses amis qu’il considère comme des "traîtres". Um exerce une ascendance au sein du parti grâce à ses capacités de leadership, son sens du débat, sa maîtrise de l’art oratoire, son courage. "Peu de mouvements révolutionnaires africains auront eu un chef de sa valeur" écrira Georges Chaffard dans le tome II des "Les carnets secrets de la décolonisation". Sous sa houlette, l’UPC se positionne en faveur de l’indépendance immédiate, de la réunification avec le Cameroun britannique, et la renaissance culturelle du Cameroun.  Personnalité marquante, Ruben Um Nyobè a été repéré très tôt par les services de sécurité et de renseignement. On peut ainsi lire dans une fiche dressée sur lui en 1947, à une époque où il est encore peu connu les commentaires suivants :    Um Nyobè se rend à l'ONU trois années de suite pour plaider l'indépendance du Cameroun   "Intelligent, il cherche à acquérir par lui-même une culture supérieure...Depuis les dix-huit derniers mois, il a consacré toute son activité à créer de nombreux syndicats réunis en Union régionale, dont il est le secrétaire général…Est l’un des membres les plus actifs du mouvement démocratique camerounais, bien que ne paraissant pas lui-même…Elément dangereux. Sort très peu, mène une vie retirée, ayant un noyau d’amis très restreint"  Ce parti "nationaliste" ne plaît guère à l’administration française qui décide d’en encourager d’autres. La stratégie de Soucadaux souligne Georges Chaffard (1) est parfaitement résumée par une directive donnée par un chef de région, Mr Humbert, à ses subordonnés :   "La meilleure action que nous puissions avoir, c’est de susciter des oppositions africaines et de rendre la vie impossible aux meneurs upécistes en leur opposant des Africains décidés et énergiques".  Parallèlement, Um a aussi entamé des démarches auprès de l’ONU où des pétitions en provenance du Cameroun ont été déposées. Une mission des Nations-Unies s’est rendue au Cameroun pour observer la situation sur place. Um se rend lui à plusieurs reprises à New-York où il témoignera en 1952, 1953 et 1954 devant la quatrième commission des Nations-Unies. Il réclame dans ses revendications à l’ONU la réunification et l’indépendance du Cameroun. Des camerounais de tendances diverses se rendent aussi à l’ONU, où ils défendent des thèses différentes des siennes, contestant notamment sa revendication d’indépendance.  
  ©Pierre Mesmer
La popularité de l’UPC est telle que le voyage de Um Nyobè en 1952 est financé grâce à une souscription publique. "Paris Match" écrit à l’époque :   "Um Nyobè, leader de l’Union populiste du Cameroun est attendu à New-York où la commission de tutelle présidée par son frère de race, Ralph Bunche l’admettra au débat sur le mandat, en accusateur des puissances mandataires".  Pour l’ensemble de la jeunesse camerounaise "évoluée", Um Nyobè est le leader incontesté du patriotisme camerounais, et pour les masses populaires, il est un héros qui permettra l’avènement de jours meilleurs. Son rayonnement est tel que son nom circule dans les campagnes camerounaises comme celui d’un être de légende doté de pouvoirs magiques. La renommée de "Mpodol" (qui signifie "celui qui porte les revendications de") comme on le surnomme s’étend au-delà de son pays d’origine le Cameroun. Um Nyobè est très actif, écrit des articles politiques, tient des meetings auxquels assistent parfois des dizaines de milliers de personnes, rencontre les masses populaires et se déplace dans l’ensemble du pays qu’il sillonne pour porter la bonne parole, n'hésite pas à accuser certains membres de l'église de soutenir la colonisation.  En 1954, un nouveau haut commissaire, Roland Pré, arrive au Cameroun et veut nouer un dialogue avec tous les groupements politiques de la place, qu'il espère garder ainsi sous contrôle, mais l’UPC appelle à le boycotter.   Le 19 mai, Félix Moumié, un des responsables du parti, annonce que Um Nyobè est dans le maquis. La tension monte d’un cran lorsque le 22 mai, des gendarmes signifient à des partisans de l’UPC que leurs réunions sont interdites, et les moleste. Le même jour, 22 mai 1955, l’UPC réplique et annonce qu’elle refuse désormais de reconnaître l’administration française et réclame la création d’un comité exécutif provisoire. Le 23 et le 24, des incidents éclatent à Douala où une foule armée de gourdin et machettes prend d’assaut la prison, la police tire faisant 4 morts et 20 blessés. Dans d’autres villes du pays, à Nkongsamba, à Yaoundé, des émeutes éclatent également parfois avec des morts à la clé. Fin mai, le décompte est de 20 morts, 114 blessés chez les émeutiers, 4 morts (2 français) et 13 blessés dans le reste de la population.  Le 13 juillet 55, l’UPC et ses branches sont officiellement interdits. L’insurrection de mai n’est pas approuvée par Um qui considère qu’elle n’avait que peu de chance de succès. Il a par ailleurs toujours été partisan de solutions pacifiques et réprouve l’utilisation de la violence. Il effectuera plus tard une critique globale, préconisant une meilleure organisation du parti pour éviter les échecs des actions entreprises :  "Certains camarades peuvent penser que les dirigeants de l’UPC mettent l’organisation du mouvement au-dessus des grands problèmes de l’heure. Cela est vrai. Nous savons par expérience que tous les problèmes politiques peuvent être résolus avec une bonne organisation, tandis que tous les échecs et même les catastrophes sont possibles dans un mouvement mal organisé."  
  ©Roland Pré arrive au Cameroun
L'impossible retour à la légalité de l'UPC   En juin 56, le président de l’Assemblée territoriale camerounaise Soppo Priso, crée un mouvement "d’Union Nationale" et noue des contacts avec l’UPC pour lui proposer de faire campagne sous la bannière de l’Union Nationale. Si l’UPC accepte de ne pas "prêcher pas la violence", l’administration fermera les yeux. Mais l’UPC refuse. Les élections du 23 décembre vont donc se dérouler sans le parti à l’emblème du crabe. Un projet de loi d’amnistie était en préparation avant les élections, mais la lenteur de la procédure incite les upécistes à la méfiance. Il semble en réalité que tout ait été fait afin que l’UPC ne puisse se présenter aux élections.  En décembre 56, l’UPC crée une branche armée, le CNO (Comité National d’Organisation) et décide de passer aux actions de sabotage, lignes téléphoniques sectionnées, voies ferrées coupées via des explosifs, ponts routiers détruits entre Yaoundé, Douala et Edéa...le département de la Sanaga Maritime passe sous contrôle de l’UPC. Malgré ces actions, les élections législatives prévues pour le 23 décembre 1956 sont maintenues. La première assemblée législative du Cameroun est élue. Le recours à la violence armée pour revendiquer l’indépendance fait alors du Cameroun une spécificité parmi les territoires d’Afrique noire sous domination française : c’est le seul pays de cette zone où on a recours à la lutte armée.  Le 28 janvier 1957, l’assemblée législative camerounaise adopte le statut d’Etat autonome sous tutelle (statut qui pourra être modifié plus tard pour permettre la levée de tutelle et l’accession à l’indépendance). Sur proposition du haut-commissaire Pierre Messmer, André-Marie Mbida devient le 1er premier ministre du Cameroun, et se révèlera un farouche adversaire de l’UPC qu’il accusera dans un discours resté célèbre « d’avoir trompé le peuple».  L’UPC est sollicitée pour savoir sous quelle condition elle reviendrait dans le jeu politique classique. On parle ainsi d’une entrée d’Um Nyobè à l’assemblée territoriale à la suite d’une élection partielle. Um qui est dans le maquis répond en faisant publier plusieurs lettres ouvertes dans lesquelles il expose les conditions qui selon lui permettront de "la détente politique et morale". Tout d’abord, il réclame l’application du projet de loi d’amnistie, qui a été ajourné. Il réclame également l’abrogation du décret du 13 juillet 55 suite auquel l’UPC a été interdite. Enfin la 3ème condition réside dans la déclaration solennelle par le gouvernement français "portant sur la reconnaissance de l’indépendance et de la souveraineté du Kamerun", même s’il précise bien que cette indépendance n’est pas subordonnée au départ de la France, Etat tuteur.  Mais les élections de 56, le statut de mai 57, l’entrée dans le jeu politique d’un gouvernement camerounais a sensiblement modifié la donne politique. Selon certains observateurs, l’UPC aurait du faire profil bas, mais elle choisit "plutôt que de s’insérer modestement dans de nouvelles structures d’agir en doctrinaire et d’en nier la validité, et à s’arc-bouter sur le fait que la loi d’amnistie n’ait pas été votée." Mbida, qui est chef de gouvernement n’est pas partisan d’une amnistie générale qui réintroduirait l’UPC dans le jeu, et n’est pas non plus partisan d’une indépendance immédiate estimant que le Cameroun n’y est pas suffisamment préparé. Mbida en fait part à Messmer, à Paris, et au Cameroun.  Les conditions posées par Um n’ayant pas été prises en compte, l’UPC relance l’action violente (incendies, enlèvements, assassinats). Une seconde fois, le projet de loi d’amnistie concernant l’UPC est ajourné par le conseil de la république à Paris. Mgr Thomas Mongo va alors jouer les négociateurs entre l’UPC et les autorités représentées par Pierre Messmer car Mbida n’est pas dans la confidence. Um pose comme condition une rencontre publique avec Messmer, et une nomination à un poste de premier ministre dans un gouvernement d’Union Nationale, des conditions que le gouvernement n’a pas l’intention d’accepter. Messmer de son côté a une marge de manœuvre restreinte car il ne peut accepter sans en référer à Paris.  Mbida se met en colère quand il apprend que Messmer a essayé de négocier avec l’UPC. Mongo rencontre Messmer auquel il soumet l’idée d’une rencontre entre lui et Um Nyobè à laquelle Messmer n’est pas opposée. Mais lorsque Mongo repart dans le maquis rencontrer Um Nyobè, celui-ci a changé de position et refuse tout contact avec l’administration s’il n’a pas la garantie d’être désigné premier ministre d'un gouvernement d'Union Nationale.  Le 23 novembre 1957, une patrouille tombe par hasard sur l’un des refuges du "secrétariat administratif et bureau de liaison" de l’UPC dans le maquis, ce qui permet à l’administration de découvrir l’ampleur de l’organisation de l’UPC, beaucoup plus profonde qu’elle ne le croyait. Les "pillages et assassinats" ne sont pas commis par hasard, mais sont le résultat de procédure soigneusement menées. Une administration parallèle a été mise en place avec pour objectif à terme de montrer qu’en Sanaga Maritime on pourra se passer de l’administration centrale, ce qui montrerait qu’une partie du territoire national a "pu se libérer par ses propres moyens ».  Des « départements techniques" sont même chargés de la fabrication de fusils et de pistolets, de l’approvisionnement en munitions, outillage et matériel. Un véritable appareil de lutte et de guerre révolutionnaire est en place. Par ailleurs, Um, bien que vivant dans le maquis continue d’entretenir une correspondance avec l’ONU, de répondre à des interviews (dans "La Dépêche du Midi" par exemple), de publier des écrits politiques.
  ©Um Nyobè en famille
Messmer et ses conseillers pensent déjà à remplacer le premier ministre et d'autre part, Messmer nomme un délégué à la région sud-cameroun pour rétablir l’ordre en Sanaga Maritime. Le 9 décembre, la ZOPAC (Zone de Pacification du Cameroun) est créée. Cette campagne s’étendra sur 11 mois et sera la dernière campagne de "pacification" menée par l’armée française sur le continent africain.  L’action s’avère efficace puisque le nombre de "maquis" détruit passe de 9 en janvier 1958 à 62 en juillet. Le nombre de maquisards de l’UPC capturés et qui se rallient augmente sans cesse : De 70 en mars il atteindra 320 en novembre. Le 7 juin, le "général" Nyobè Pandjock Isaac est surpris dans son poste de commandement et tué. La confrontation militaire tourne à l’avantage des forces armées françaises. Um est toujours dans le maquis, mais de plus en plus seul, entouré de proches (sa compagne, son dernier né notamment) et tient un journal où il note ses rêves, ses aspirations et ses mauvais pressentiments. Les conditions de vie sont de plus en plus difficiles pour lui d’autant que son réseau de soutien, d’aide et de fidelité se démantèle progressivement. En août (57 ou 58 ?) il se rend secrètement à Douala, où une réunion clandestine de dirigeants se tient.  On y discute du retour de l’UPC à la légalité, d’autant que la donne vient une fois de plus de changer. Le haut-commissaire Ramadier a parlé d’indépendance, l’assemblée législative qualifiée de "fantoche" par Um Nyobè a officiellement demandé la reconnaissance à terme de l’indépendance, la levée de la tutelle et immédiatement le transfert de compétences en ce qui concerne la gestion des affaires intérieures. Amadou Ahidjo, qui a succédé à l’ex-premier ministre Mbida, est parti pour Paris négocier le planning de ces différentes étapes. L’UPC qui a été le parti le plus actif dans la revendication de l’indépendance du Cameroun risque de se voir dépassée par "les collaborateurs" du gouvernement Ahidjo. Une loi d’amnistie a été promulguée le 17 février 1958, et ce pourrait être pour Um l’occasion de revenir au devant de la scène en toute légalité.   Lors de la réunion, Um affirme que son devoir est d’être dans le maquis tant que l’indépendance ne sera pas proclamée (il se méfie des promesses faite par la France d’accorder l’indépendance à terme) et en tant que symbole de la nation camerounaise, il ne peut abandonner le flambeau de la nation camerounaise. Mais il se dit prêt à renoncer à la lutte armée si ses camarades de l’UPC pensent que le retour à la bataille légale est la solution. Par la suite, certains observateurs affirmeront que le retour de Um dans le maquis avait été encouragé par des membres de l’UPC qui faisaient un calcul politique. Um tué, capturé, emprisonné, et c’est tout l’héritage de l’UPC qui pourrait être monnayé auprès des dirigeants par les "héritiers spirituels" de Mpodol.   La mort de Um Nyobè dans le maquis   Après une longue période de repérage où ils ont été aidés par des "ralliés", et des indics "traîtres", les services de renseignement parviennent à localiser la zone dans laquelle Um Nyobè se cache dans le maquis. Les patrouilles se multiplient dans cette zone et le samedi 13 septembre 1958, dans les environnements de Boumnyébel, une des équipes d’un détachement opérant par groupe de quatre à cinq personnes découvre un campement fraîchement abandonné. La zone est quadrillée, et quelques temps plus tard, une patrouille de tirailleurs saras (Tchad) commandée par un sergent-chef africain découvre quatre hommes cachés dans les buissons. L'indicateur qui a conduit jusqu'à Um Nyobè le désigne du doigt. Alors que ce dernier cherche à s'enfuir, il est abattu de plusieurs balles par un des soldats.  L’un des quatre morts sera identifié comme étant Um Nyobè par des notables de Boumnyébel. Près du cadavre de Um, on retrouve la sacoche qu’il transportait avec lui. Elle contient des archives de l’UPC et le carnet dans lequel le "Mpodol" notait ses rêves et ses pensées quotidiennes, les taches à accomplir. Les corps sont ramenés au village et les villageois sont invités à venir constater la disparition de Um Nyobè. Il est mort en serrant dans la main un "gris-gris" (fétiche) qui ne l’a pas protégé des balles. Une délégation de l’association des Notables du Cameroun vient de Douala pour voir le corps. Un service religieux est célébré à Boumnyebel par un pasteur protestant. Après l’inhumation, dans l’enceinte de la mission protestante d’Eseka, la tombe du prophète de l’indépendance devra être recouverte d’une chape de ciment, pour empêcher ses plus proches partisans de venir enlever son corps.   Les versions divergent cependant sur les conditions de l’assassinat de Um Nyobé. Certains historiens et acteurs de l’époque affirment que les patrouilles avaient reçu l’ordre d’abattre Um Nyobè, tandis que d’autres pensent que la mort d’Um Nyobé était un accident résultant des circonstances de sa capture. D’autres encore pensent que Um Nyobè a été livré par un traître, en l’occurrence Théodore Mayi Matip, qui aurait opportunément disparu quelques instants avant que Um et ses compagnons ne soient surpris par une patrouille. Ce dernier se ralliera au gouvernement d’Amadou Ahidjo et sera le représentant de "l’UPC légale".   Ainsi s’acheva donc la vie d’un homme qui lutté contre les forces coloniales et avait combattu pour l’indépendance de son pays avant que d'autres n'en recueillent les fruits le 1er janvier 1960, quand fut proclamée l'indépendance du Cameroun.z

samedi 10 septembre 2016

À la découverte de Um Nyobé

A la découverte de Ruben Um Nyobé
(18/12/2005)
Né en 1913 près de Boumyebel, Ruben Um Nyobé est sans aucun l'un des plus grands leaders de la cause indépendantiste et de la luttre contre l'oppression au Cameroun...
Par Samuel Nelle
Ruben Um Nyobé (1913 - 1958)
Ruben Um Nyobé (1913 - 1958) Ruben Um Nyobe est né en 1913 à Song Peck près de Boumyebel dans l'arrondissement d'Eséka, de Nyobé Nsounga et de Ngo Um Nonos, des paysans Bassa, à 180 kilomètres de Douala.
Il a fait ses études primaires dans les écoles locales des missionnaires presbytériens (en 1920 il fréquente l'école presbytérienne de Makay où il est baptisé en 1921; en 1924 il quitte cette école pour l'école d'Ilanga près d'Eséka où il obtient son certificat d'études primaires en 1929) puis il intègre en 1931, l'Ecole normale de Foulassi en pays bulu, tenue également les presbytériens.
Il est renvoyé de cette école, l'année où il doit obtenir son diplôme de fin d'études, accusé d'être toujours prompt à prendre la tête des mouvements de revendication et de protestation. Il obtient néanmoins son diplôme de fin d'études, en temps que candidat libre.
Il enseigne pendant quelques années dans les écoles presbytériennes. En 1935, il est admis au concours des commis des services civils et financiers. Il poursuit ses études en travaillant et obtient par correspondance sa première partie du baccalauréat en 1939. Il est affecté au greffe du tribunal d'Edéa. Dans l'exercice de son métier, il se passionne pour le droit. Ce faisant, il découvre l'injustice à laquelle sont soumis les camerounais, à travers le système de l'indigénat. En effet, la loi distingue les indigènes (camerounais) considérés comme des sujets, des français considérés comme des citoyens. La loi ne laisse aucune possibilité d'expression pour la lutte politique ou pour la défense des droits des travailleurs aux indigènes.
La participation de nombreux indigènes à la luttre de libération de la France après 1940 contre les allemands va permettre à la France libre du général de Gaule d'alléger quelque peu les rigueurs des lois sur l'indigénat. En 1944, sous la pression des évènements, la France reconnaît aux travailleurs camerounais le droit de syndiquer.
En 1945, grâce à l'appui de la Confédération Générale des Travailleurs (CGT), syndicat français proche du parti communiste, Um Nyobé participe à la création de l'Union des Syndicats Confédérés du Cameroun (USCC) dont il devient le sécrétaire général adjoint.
Um Nyobé va alors consacrer son énergie à créer une multitude de syndicats qu'il réussit à fédérer en unions syndicales régionales puissantes. L'USCC met ensuite en place, le Cercle d'Etudes Sociales et Syndicales, sorte d'école de formation au syndicalisme, où des spécialistes analysent et étudient le système d'exploitation économique et politique du régime colonial.Um Nyobé est très assidu aux conférences données par les syndicalistes de la CGT.
Dans le Cercle, on développe l'idée selon laquelle le système d'exploitation des travaileurs s'appuie sur le statut colonial du Cameroun et que l'amélioration du sort des travailleurs passe nécessairement par l'émancipation politique du Cameroun.
Um Nyobé pense que l'indépendance seule peut permettre l'amélioration du sort des travailleurs et des masses laborieuses. L'indépendance du Camerouna devient alors pour lui, un objectif stratégique. En 1946, la France autorise les activités politiques au Cameroun. Le 10 Avril 1948, Um Nyobé avec d'autres patriotes créent l'Union des Populations du Cameroun (U.P.C).
Pour faciliter la reconnaissance du parti, ses fondateurs syndicalistes parmi lesquels se trouve Um Nyobé décident d'un commun accord de ne pas figurer leurs noms sur la liste officielle des membres fondateurs. Les syndicalistes en question n'apparaîtront au devant la scène qu'une fois le parti reconnu. Après plusieurs hésitations des autorités coloniales, le partie est reconnu le 9 Juin 1948. Aussitôt, Um Nyobé se dévoile et apparaît le 17 Juin à Abidjan comme le représentant officiel de l'UPC au Congrès du Rassemblement Démocratique Africain. En réalité, ce n'est qu'en 1950 qu'il devient officiellement Sécrétaire général du parti à l'issue du premier congrès. A ce titre, il est le principal animateur du parti.
A partir de cette date, Um va se consacrer exclusivement à la politique et abandonner son poste de sécrétaire de l'USCC à son ami Jacques Ngom.
Depuis 1949, Um a demandé et obtenu auprès de l'administration coloniale, sa mise en disponibilité pour pouvoir s'occuper de ses activités. En Décembre 1952, il se rend à New York où il prononce un réquisitoire contre la France à l'Organisation des Nations Unies (ONU) devant la commission de tutelle. Dans ce réquisitoire, il démontre que la France administre le Cameroun de la même façon que ses propres colonies, avec l'intention d'incorporer dans l'empire français alors que le Cameroun est une pupille de l'ONU qui en a seulement confié la tutelle à la France. Il dénonce les lenteurs de la France pour mettre en place les réformes politiques au Cameroun. Il souligne que ces réformes doivent tenir compte de la spécificité du Cameroun, autrefois uni sous le protectorat allemand, maintenant divisé en deux parties dont la partie occidentale est placée sous l'administration anglaise et la partie orientale sous administration française. Il insiste sur la nécessité de la réunification des deux Cameroun qui doivent politiquement évoluer ensemble.
De retour au Cameroun au début de 1953, Um Nyobé fait imprimer le texte de son intervention aux Nations Unies sous la forme d'un mémorandum intitulé : « Que veut le Cameroun ? »

Dans ce texte, on peut retenir que le Cameroun veut la réunification des deux Cameroun d'une part, et l'indépendance d'autre part. Um Nyobé qui a trouvé une tribune attentive à l'ONU y retourne en Décembre 1953 où il accuse encore la France de retarder l'émancipation du Cameroun. En Janvier 1954, il demande à la France d'organiser un référendum sur la question de la réunification et de fixer un délai pour la fin de la tutelle et l'accession à l'indépendance. Dès lors, il fait l'objet d'une surveillance stricte des autorités françaises.
Le 18 Avril 1955, son domicile est attaqué par la police. Sa femme et une vingtaine de ses partisans sont pris en otage par la police. Um se réfugie alors à Boumyebel, son village natal. C'est le moment que choisit l'église catholique pour mettre en garde les fidèles contre l'UPC. En pleine période pascale, la conférence épiscopale fait lire dans toutes les églises une lettre violente contre l'UPC :
« Nous mettons les chrétiens en garde contre les tendances actuelles du parti politique connu sous le nom de l'Union des Populations du Cameroun, en raison non pas de la cause de l'indépendance qu'il défend, mais de l'esprit qui l'anime. » Cette lettre allume la mèche qui va embraser le Cameroun.
Il faut relever en effet que l'instigateur de cette campagne de dénigrement de l'Eglise contre l'UPC n'est personne d'autre que le docteur Louis Paul Ajoulat, médécin français, leader du Bloc Démocratique Camerounais (BDC) parti d'obédience catholique et anti-intépendantiste.
Parmi les partis opposés à l'UPC, le BDC est le parti anti-indépendantiste le mieux structuré. A l'image de l'UPC, il s'appuie sur un syndicat, la Confédération des Travailleurs Chrétiens (CTC). Il est soutenu par la hiérarchie catholique et l'administration coloniale. Il s'appuie sur les organisations catholiques disséminées dans le pays et parmi elles, la toute puissante « Ad Lucem ».
A la suite de la publication de la lettre pastorale, des incidents éclatent entre les indépendantistes de l'UPC et les anti-indépendantistes animés par le BDC. Dans certaines localités, les missionnaires sont agressés et les biens de l'Eglise saccagés. Le 22 Mai 1955, les autorités interdisent une réunion de l'UPC à Mbanga. Les militants passent outre l'interdiction. Les forces de l'ordre chargent. Les Upécistes résistent. Un policier est tué. La situation s'envenime et les émeutes gagnent tout le Sud Cameroun, notamment Douala. Le 26 Mai, le Gouverneur Roland Pré qui a fait venir les forces françaises stationnées au Congo, mate l'insurrection à Douala. Il y'a des dizaines de morts et de blessés. Six cent dix sept Upécistes sont officiellement arrêtés. Le 13 Juillet, l'UPC et toutes ses organisations annexes sont interdites.
Um Nyobé et ses partisans du pays Bassa gagnent le maquis dans la forêt de Boumyebel pour continuer leurs activités politiques dans la clandestinité. Félix Moumié le président officiel de l'UPC avec d'autres leaders, Abel Kingué, Ernest Ouandié se réfugient à Kumba. De Kumba, ils s'exilent à l'étranger. Um Nyobé resté au Cameroun, incarne désormais tout seul, l'UPC sur le sol colonial. Les Français qui savent qu'il est l'aile la plus modérée du parti et qu'il est le plus populaire et le plus écouté des leaders de l'UPC, lui envoient plusieurs délégations pour le convaincre de sortir du maquis avec ses partisans pour négocier. Mais Um Nyobé demande des garanties politiques, notamment la réhabilitation de son parti, l'UPC, ce que la France ne veut pas.
Le 29 Avril 1956, à travers une loi dite « Loi Cadre », la France définit un nouveau cadre juridique à travers lequel l'évolution de ses colonies d'Afrique est envisagée. Cette loi donne au Cameroun sous administration française, la possibilité d'évoluer par étapes vers l'indépendance alors que l'UPC exige l'unification préalable des deux Cameroun et l'indépendance immédiate. La « loi Cadre » prévoit que le Cameroun deviendra tout de suite un Etat sous tutelle avec un gouvernement à compétence locale et la possibilité d'évoluer à long terme vers un Etat souverain. Des élections doivent mettre en place une Assemblée locale. Le parti majoritaire à l'Assemblée aura la possibilité de former un gouvernement local dont le Premier Ministre sera nommeé par le Haut Commissaire de la république française au Cameroun. Afin que lui-même et les siens puissent participer à ces élections, Um Nyobé réclame la levée de l'interdiction de son parti et l'amnistie pour faits et délits politiques commis avant Mai et en Mai 1955. La réhabilitation de l'UPC et l'aministie sont refusées par les autorités françaises. Um Nyobé ironise alors sur la « loi Cadre » en la traitant de « loi des fers » (allusion faite à M. Gaston Deferre, initiateur de la loi Cadre)
La situation au Cameroun devient tendue au point que l'admnistration annonce finalement en Août 1956, son intention d'amnistier les personnes mêlées aux évènements de Mai 1955. Mais Um Nyobé n'avait pas été mêlé à ces évènements. Les faits qui lui sont reprochés sont antérieurs à cette date. Il n'est donc pas amnistiable. Par ailleurs, l'amnistie prévue n'annulant pas l'interdiction du parti, l'UPC ne pourra présenter de candidats aux élections prévues par la loi-cadre dont la date est fixée au 8 Novembre. Après de nombreuses tractations, la date des élections est repoussée au 23 Décembre. L'amnistie prévue n'est décidée par la France que le 11 Décembre, après la date de dépôt de candidature, douze jours avant les élections. Il apparaît clairement, que la France ne souhaite pas la participation de l'UPC à ces élections, même dans le contexte de la loi Cadre.
Dans la Sanaga Maritime, fief de Um Nyobé, ce boycott prend une tournure dramatique avec l'assassinat de candidats transfuges de l'UPC (Dr Délangué et M. Mpouma), le sabotage des équipements publics, l'incendie des bureaux de vote. Les représailles de l'armée française sont terribles. La quasi totalité des habitants de la Sanaga Maritime gagnent le maquis où se cache toujours Um Nyobé maintenant surnommé « Mpodol », ou celui qui porte la voix, celui qui défend la cause.
Mgr Thomas Mongo, évêque de Douala, premier évêque Camerounais, originaire de la Sanaga Maritime essaie de persuader sans succès Um Nyobé de sortir du maquis, au cours d'une rencontre secrète en 1957. Ruben Um Nyobé refuse. Il exige l'amnistie totale et inconditionnelle pour tous les faits et délits commis avant Décembre 1956, le rétablissemnt de l'UPC, la réunification et l'indépendance du Cameroun. Mgr Thomas Mongo rapporte aux autorités son entretien avec Um Nyobé.
Lorsque la loi d'amnistie est votée le 17 Février 1958, elle ne s'applique qu'aux actes commis avant le 2 Janvier 1956. En clair, ceux qui ont été impliqués dans les troubles précédant ou ayant suivi les élections de Décembre 1956 ne sont pas concernés par l'amnistie. De plus, l'UPC n'est toujours pas légalisée. Dans ces conditions, Um Nyobé estime qu'il doit poursuivre ses activités politiques et armées dans la clandestinité. Il installe son quartier général à Mametel dans les environs de Boumyebel. L'armée rebelle le traque alors impitoyablement avec ses partisans maquisards.
Au début du mois de Septembre 1958, les militaires français dont le commandant en chef est le colonel Lamberton localisent son poste de commandement à Mametel. Informé,Um Nyobé quitte Mametel le 10 Septembre en pleine nuit sous une pluie battante, avec huit de ses fidèles dont deux femmes et son homme de confiance Mayi Matip Théodore. Ils ont décidé d'aller se cacher ailleurs dans le maquis dirigé par Alexandre Mbend Libot. Le lieu de rendez-vous est une grotte secrète. Après quelques heures de marche, le cortège qui s'est perdu dans la forêt décide de bivouaquer dans les rochers environnants. Le lendemain au lever du jour, le groupe réalise avec effroi qu'il a passé la nuit dans la « tanière aux lions », « lia li njee » en langue bassa, lieu connu et fréquenté par l'armée. Um Nyobé décide alors de dépêcher deux éclaireurs au village le plus proche. Leur mission est de ramener un guide capable de conduire le groupe jusqu'au maquis de Mbend Libot.
Le roman de Mongo Beti : "Remember Ruben"
Le roman de Mongo Beti : "Remember Ruben" Mais le 13 Septembre avant le retour des éclaireurs, Um Nyobé entend un bruit de pas et signale à son entourage la présence des militaires. Aussitôt, des coups de feu éclatent. Son compagnon Yem Mback est tué à bout portant ainsi que les deux femmes qui l'accompagnent. Um Nyobé est identifié par les indicateurs qui accompagnent la patrouille. Il est sans arme, il tient à la main un cartable qui contient ses documents et son agenda personnel. Paul Abdoulaye, soldat d'origine sara (Tchad) enrôlé par l'armée française, ouvre le feu sur lui. Il est atteint au dos et meurt dans d'atroces souffrances. Théodore Mayi Matip a échappé au massacre. Pressé par un besoin naturel, il était se soulager (dit-il) lorsque la patrouille a surpris Um. Le corps de Um Nyobé est enroulé dans un drap puis traîné jusqu'à Boumyebel où il est exposé en public.
Quelques jours après, le corps de Um Nyobé est accompagné dans sa dernière demeure par le pasteur Song Nlend.

mercredi 7 septembre 2016

Ruben Um Nyobé, un assassinat programmé

Ruben Um Nyobé, un assassinat programmé

JEAN CHATAIN
VENDREDI, 22 MARS, 2013
L'HUMANITÉ
Né voici un siècle, le militant camerounais, président 
de l’Union des populations camerounaises, demeure 
une figure emblématique de la lutte pour une indépendance authentique des peuples africains. Il a été exécuté le septembre 1958 par l’armée française.
La plus longue «pacification» de l’histoire coloniale française demeure méconnue par l’essentiel de l’opinion hexagonale. Ni la guerre d’Indochine, ni la guerre d’Algérie, ce fut ce qu’il faut bien appeler la guerre du Cameroun, amorcée en 1955 avec l’interdiction de l’Union des populations camerounaises (UPC) par le gouvernement Edgar Faure, intensifiée trois ans plus tard par le pouvoir gaulliste après l’exécution sommaire du secrétaire général de l’UPC, Ruben Um Nyobé, poursuivie après « l’indépendance » octroyée de 1960 sous prétexte de coopération militaire avec le gouvernement d’Ahmadou Ahidjo, lequel n’avait rien à refuser à Paris qui l’avait choisi et mis sur orbite. L’exemple type du dirigeant néocolonial sélectionné par l’ex-puissance métropolitaine soucieuse de maintenir son emprise sur un pays auparavant soumis à son pillage direct. Un homme aux ordres qui, dûment encadré par les « conseillers » français, mena une répression impitoyable contre son peuple jusqu’en janvier 1971, lorsque fut publiquement exécuté, au terme d’une parodie de procès, Ernest Ouandié, devenu président du Parti nationaliste camerounais, toujours contraint à la clandestinité. Dernière guerre coloniale avec le conflit algérien dont elle fut contemporaine, elle fut aussi et indissociablement la première intervention néocoloniale annonçant et préparant toutes celles qui allèrent suivre dans les périodes ultérieures.
Né voici un siècle, ­Ruben Um Nyobé demeure pour les progressistes africains une figure emblématique de la lutte de libération nationale, à l’instar du Congolais Patrice Lumumba. Évoquant sa première apparition sur le devant de la scène politique, le 18 octobre 1945 (jour où il est nommé secrétaire général adjoint de la confédération syndicale USCC), l’écrivain Mongo Beti le désigne comme « l’homme qui va donner une âme à son pays » (1)… Ce rôle d’éveilleur des consciences est confirmé par l’universitaire Kangue Ewane : « Quand je suis arrivé en pays bamiléké, Ruben Um Nyobé y effectuait ses premières actions de sensibilisation. Il nous disait : “Vous êtes des esclaves inconscients”… À cette époque, le Blanc, on ne le regardait même pas en face (…). Mettez trois faits côte à côte – Diên Biên Phu, l’Algérie, le Cameroun – et tout s’éclaire. C’est au moment de Diên Biên Phu que l’UPC a commencé de se faire pleinement entendre. Que le discours d’Um Nyobé sur la réunification d’abord ­(colonie allemande avant 1914, le pays demeurait divisé en une partie sous domination anglaise et une sous domination française – NDLR), l’indépendance ensuite, a commencé de polariser l’attention des Camerounais. Les Français ont fait au Cameroun ce qu’ils ont fait en Indochine, c’est-à-dire la guerre. » (2)
13 septembre 1958, une patrouille du BTC1 investit la forêt de Boumnyebel, village natal de Ruben en plein pays bassa (Sanaga-Maritime), abat le secrétaire général qui y avait trouvé refuge après l’interdiction de l’UPC, sa belle-mère Ruth, Pierre Yem Mback et Jean-Marc Poha. Le groupe ne détenait aucune arme, ce que l’officier français commandant la patrouille savait, tout indiquant qu’il opérait à la suite d’une dénonciation. Ce fut un acte décidé en haut lieu, juge Abel Eyinga (3) ; selon lui, un faisceau de facteurs objectifs (efficacité des techniques françaises de contre-guérilla, délation, chasseurs de primes…) avait conduit à la localisation de Ruben Um Nyobé par l’armée coloniale assez longtemps avant le 13 septembre. Les militaires n’auraient eu l’ordre que de garder sa trace dans le collimateur. Jusqu’au jour où l’ordre fut donné de le supprimer…
Expatrié français spécialiste des travaux publics, Stéphane Prévitali, qui connaissait Ruben Um Nyobé, rappelle que l’assassinat fut précédé de rumeurs faisant état d’une prime pour la dénonciation de ce dernier. « Je comprends que cette prime est un appel à la trahison pour un assassinat programmé. Cette prime, dont le montant n’est pas précisé, mais que la rumeur dit être “vraiment trop”, ne peut être qu’une prime d’abattage », écrit-il avant de donner son analyse : « La mort du leader avait été programmée dès son refus de rentrer dans la légalité lors de la mission officieuse de Mgr Mongo dans le maquis d’Um Nyobé, en octobre 1957 ; mission demandée par le haut-commissaire Pierre Messmer, à l’insu du premier ministre d’alors, André-Marie Mbida (…). Depuis la mise en place, par le gouvernement Ahidjo, d’une campagne dite de “réconciliation” au sein de l’ethnie bassa dans toute la Sanaga, la mort d’Um Nyobé était devenue une sorte d’hypothèque à lever » (4).
Avant « l’indépendance », la reconquête…  Dans son bulletin pour le troisième trimestre 1958, le service de sécurité français avait ce commentaire révélateur : « La mort d’Um Nyobé 
et le courant de ralliements qui l’a suivie en Sanaga-Maritime ont détendu grandement l’atmosphère dans cette région (…). Une certaine tension s’est par contre manifestée en pays bamiléké (mais) les coups qui ont été portés par l’armée aux rebelles de l’UPC, conjugués avec la nouvelle politique française préconisant l’indépendance du Cameroun en 1960, ont, là aussi, isolé en grande partie le courant extrémiste du nationalisme appuyé par le PC et le nassérisme au bénéfice du nationalisme légal (souligné 
dans le texte). » Rédigeant le troisième 
tome de ses Mémoires, Michel Debré écrit froidement qu’à l’approche de l’échéance prévue pour l’indépendance officielle du Cameroun, 
il avait pris la décision « d’entreprendre 
une véritable reconquête »… Une expression 
qui en dit long sur la « décolonisation » 
française : reconquérir pour pouvoir 
octroyer l’indépendance !
(1) Main basse sur le Cameroun, de Mongo Beti 
(La Découverte, 2003). Livre interdit en 1972 par 
Raymond Marcellin sur la suggestion de Jacques Foccart.
(2) Kamerun, l’indépendance piégée, cosigné par 
Jean Chatain, Augusta Epanya et Albert Moutoudou (l’Harmattan, 2011).
(3) L’UPC, une révolution manquée ?, d’Abel Eyinga 
(Chaka, 1991).
(4) Je me souviens de Ruben, de Stéphane Prévitali (Karthala, 1999).

mardi 6 septembre 2016

Posts du mois d'août sur facebook



Posts du mois d’août

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Après 6 jours sans une goutte d'eau, sans explication et après ce post, la CDE envoie un peu d'eau vers 5h du matin et coupe dès que le jour se lève. C'est quelle histoire çà? De qui se moque-t-on?

30
1, 2, 3, 4, 5, 6 jours sans eau de la CDE. Six jours entiers sans la moindre goutte d'eau. Et nul ne se croit obligé de s'expliquer. Combien de temps cela va-t-il durer? Et après cela ils vont venir nous tendre, toute honte bue, la facture assortie d'un délai pour payer. Peuvent-ils oser faire cela au Maroc?

27
Pardon pour réduire les risques d'accident:
Commencer votre journée par la prière pour rendre grâces au Seigneur qui nous maintient en vie sans que nous sachions comment,
Refuser la surcharge ou payer pour 2 places ou encore que trois payent pour quatre par exemple. Cela ne sert a rien de se presser pour finir à la morgue,
Que font les forces de l'ordre aux multiples postes de contrôle?
Pourquoi ne pas les sanctionner quand ils laissent passer les voitures en état de surcharge? Ils doivent savoir qu'ils devront rendre compte même devant Dieu de tous ces morts par leur défaillance. Noon! Trop, c'est trop!

26
Un accident sur l'axe Bafoussam Mbouda vient de coûter la vie à huit de nos compatriotes ce jeudi 25 août 2016. Le taxi aurait dû transporter 5 passagers. Il était donc en état de surcharge, cette infraction qui cause des accidents et qui aggrave les bilans de ces accidents, mais qui est curieusement tolérée. Le Préfet du Bamboutos s'en est même indigné, mais que fera-t-il? Que font les policiers et les gendarmes que l'on aperçoit aux postes de contrôle? Que contrôlent-ils? Pourquoi ne pas sanctionner les éléments de ces postes de contrôle qui étaient en service ce jour-là et qui ont laissé passer ce taxi? Combien de compatriotes va-t-on ainsi sacrifier sur l'autel de l'irresponsabilité de certains camerounais ?

Avis aux auteurs: vous avez une œuvre rangée dans vos tiroirs, parce que les éditeurs ne vous comprennent pas? Vous pouvez la publier gratuitement sur KDP Amazon ou sur Createspace. Les deux publient vos œuvres en 48h. Sur le premier votre ouvrage sera disponible seulement sous forme numérique. Sur le second, il est possible d'avoir aussi votre œuvre sous forme physique, c'est-à-dire comme un livre imprimé avec un numéro ISBN.

Une célèbre entreprise de micro finance de la place en difficulté. Cela arrive à la rentrée scolaire. Nous espérons que les milliers d'épargnants concernés ne seront pas abandonnés à eux-mêmes. La COBAC n'a-t-elle rien vu venir? Quel rapport avec la grippe aviaire qui a poussé à l'interdiction de la commercialisation des produits de la filière. Mais où est la subvention due aux aviculteurs?

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Maassah, en ce moment de grandes pluies, il faut payer 4 à 5 mille F et mettre 4 à 5h pour rallier Bamenda à Wum distants de seulement 80 km, selon Andy Alan. On vient de dépenser 1 milliard 300 millions pour que certaines personnes aillent s'amuser au Brésil. Et il ne se passe pas un seul jour sans que l'on ne signale des cas de malversations par milliards. Ce n'est pas sérieux. Çà c'est le Cameroun du Renouveau. Non, un autre Cameroun est possible. Ce pays n'est pas pauvre.
21
Remember Nyos. Que les âmes des compatriotes disparus reposent en paix. Qu'a-t-on fait des opportunistes et des rapaces qui ont profité de ce drame pour s'en mettre plein les poches?

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Je suis l'invité de CRTV m'accompagne au Poste National, ce jeudi 18 août à partir de 08h. Soyez à l'écoute. Au menu, la présentation de mon ouvrage LES SECRETS DE LA RÉUSSITE SCOLAIRE. Vos remarques sont attendues.

17
Les médailles aux JO coûtent cher dèh! 1milliard 330 millions et pas même une médaille de bronze. Alors qu'il y a l'or là-bas à Betare Oya. On laisse ça et on va s'embrouiller loin à Rio pendant que nos hôpitaux manquent de certains équipements essentiels et nécessaires à la prise en charge correcte des malades. Il ne faut pas participer pour faire plaisir à Pierre de Coubertin qui prétend que l'essentiel, c'est de participer. Il faut bien se préparer, avoir des infrastructures sportives, bien sélectionner et bien former les athlètes, entre autres. Et il faut savoir qu'il n'y a pas l'équilibre régional dans l'attribution des médailles aux JO. C'est le mérite, c'est la compétence.

C'est bien Rudolf Douala Manga Bell qui est notre héros, le père du nationalisme camerounais qui a été pendu le 8 août 1914 par les allemands. Il ne faut pas le confondre avec Alexandre Douala Manga Bell, ce petit prétentieux qui se faisait appeler prince, et qui comme membre de la délégation française est allé porter la contradiction au Mpodol Um Nyobé à l'ONU en décembre 1952. Il était accompagné dans l'accomplissement de cette basse besogne par Charles Okala, un autre renégat monté par le colonisateur français.

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Le régime de Yaoundé ne nous a habitués qu'aux malversations et aux gestionnaires indélicats, incompétents et mal intentionnés. La presse nous cite régulièrement des ministres et DG qui finissent piteusement en prison. Les cas de gestion exemplaires semblent rares voire inexistants. La non attribution des récompenses prévues par le statut de la Fonction publique tend à prouver que les gestionnaires intègres et irréprochables ne sont pas légion. On dirait que le système s'est spécialisé dans la détection et la promotion des personnes à moralité douteuse, dans la mesure où il serait hâtif de conclure que les camerounais sont tous pourris.

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Autre aphorisme dont usent et abusent les administrateurs : ''l'État ne peut pas tout faire''. Pourquoi est-ce nécessaire de reprendre cette antienne à ces cérémonies de plus en plus nombreuses, de réception de dons ou de réalisations des associations ou de certaines ''élites''? Quand une Administration impose de bas salaires à ses agents, encourageant ainsi la corruption, abandonne pratiquement aux APEE la construction des établissements, le paiement des salaires des vacataires et des personnels d'appui, n'équipe pas ses formations sanitaires avec les appareils les plus élémentaires, que fait-elle avec le fruit de nos impôts? Elle finance le train de vie dispendieux de ses hauts commis (grosses cylindrées, villas et autres avantages) afin de rendre les postes à pourvoir discrétionnairement attractifs, et d'autres projets controversés parce que politiquement motivés, comme cette histoire à dormir debout d'ordinateurs. Quand la politique politicienne prend le dessus, on perd le sens des priorités. Au détriment des populations désabusées.

On entend souvent dire: '' on ne peut pas mettre un gendarme derrière chaque camerounais''. Une telle déclaration traduit l'ignorance ou la mauvaise foi de son auteur d'une part, et la faillite de l'Administration, d'autre part. On pourrait aussi évoquer la faillite de l'École qui n'a pas su transformer la société en inculquant le sens de l'honneur et les valeurs nobles à ses produits. Cela dit dans un État organisé et hiérarchisé, avec des dirigeants responsables, conscients qu'ils doivent être des modèles de vertu et de rectitude et conscients de leurs potentialités et de leurs limites en tant qu'êtres humains, il n'est pas nécessaire de mettre un gendarme derrière chaque citoyen. Quand par contre les dirigeants suggèrent par leurs attitudes et leurs déclarations que la rectitude et le sens de l'honneur sont facultatifs ils ouvrent une boîte de Pandore qu'ils auront du mal à contrôler.

Les défenseurs du régime autoproclamés et mandatés ont développé un état d'esprit qui les pousse à voir en filigrane le nom de leur champion dans mes posts, même quand je ne l'ai pas mentionné. Ils ont sans doute raison. De la position qu'il occupe et au vu de tous les pouvoirs qu'il cumule il est effectivement responsable de tous nos malheurs. Si on les appelle les dirigeants, c'est que le peuple a besoin d'être dirigé et guidé vers une bonne destination. Quand ces ''guides'' sont défaillants et incompétents, les gens vont dans tous les sens, comme les automobilistes hier matin à l'entrée de Bafoussam.

Quand nous avons désapprouvé l'idée de nommer un Délégué du Gouvernement au-dessus des maires élus, à cause de son caractère anti démocratique, certains nous ont traité d'opposant aigris qui ne voient que le mal partout. Ils croyaient ainsi damer le pion à l'opposition quand elle est majoritaire dans les conseils municipaux. Maintenant que il y a un conflit entre le maire de Bafoussam 1er et le Délégué du Gouvernement là, tous les deux étant du R, que vont-ils dire? Les élus ne devraient-ils pas avoir plus d'autorité et de légitimité que les personnes nommées discrétionnairement de surcroît? Ceux qui nous condamnent quand nous dénonçons les abus et les exactions se croient intouchables, jusqu'à ce qu'ils en soient victimes, alors ils nous rejoignent et deviennent de farouches opposants. Regardez la plupart des victimes de l'opération épervier.

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Embouteillage monstre ce samedi 13 août à Bafoussam entre Madelon et le pont après l'hôtel Ino. Aucun policier présent pour mettre de l'ordre au moment où je passais par là. Résultat: les voitures qui entraient dans la ville bloquées par celles, plus nombreuses qui en sortaient et qui avaient emprunté les deux voies entre carrefour le maire et Afrique construction. Un taximan a témoigné qu'il a mis trois heures pour parcourir à peine 3 km sur le tronçon ainsi encombré. On dirait que toutes les voitures du Cameroun s'étaient donné rendez-vous à Bafoussam ce matin. Du coup les motos ont été plus rapides et les passagers qui le pouvaient ont dû abandonner les taxis pratiquement immobilisés. Vous avez dit week end mémorable?
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Decouverts et dénoncés par Mohammadou Houmfa sur facebook, ils ont rectifié en publiant une autre liste d'où ils ont exclu le doublon. Mais comment est-ce possible? Personne ne sera évidemment inquiété pour une telle ''prouesse''. Et ils prétendent nous donner des leçons de patriotisme.

Atangana Joseph Yannick doublement admissible à l'ENAM pour des épreuves qui se déroulaient le même jour! Voilà une prouesse digne du renouveau. Paul Chouta nous signalait dans un post que des feuilles non corrigées d'un concours avaient été découvertes dans une poubelle par un candidat malheureux à ce concours. Dieu va vous pousser à multiplier de telles bourdes et l'une d'elles vous sera fatale. On lance certains concours juste pour faire payer les timbres aux nombreux diplômés chômeurs de ce pays. Mais Dieu vous confondra.

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Trafic des actes d'affectation au Minesec. Les enseignants seraient peut-être moins tentés de recourir aux faux actes, si leurs salaires n'étaient pas si bas, si la bourse indiciaire prévue depuis 1987 était payée, ce qui leur aurait évité d'attendre longtemps leurs premiers salaires, s'ils n'étaient obligés d'aller à Yaoundé pour leurs prestations familiales, leurs primes et indemnités, et les effets financiers de leurs avancements, si les frais de relève étaient payés, si tous, sans distinction étaient appelés à servir dans les zones difficiles, bref si leur affection dans l'arrière-pays ne ressemblait à une sanction non dite dans un pays où l'on refuse de mettre en place les organes de gestion participative de la Fonction publique.

Le Cameroun vient de remporter une victoire contre le Kenya en foot, mais il ne faut pas trop exulter. Le Kenya bat le Cameroun en athlétisme avec ses nombreuses médailles d'or et d'argent aux courses de fond et de demi-fond, en tourisme: c'est en effet une destination privilégiée pour les touristes qui leur apportent plein de devises, en transport aérien: pendant que notre Camair-co, victime de l'incurie et de l'impéritie ambiantes bat de l'aile, la Kenya Airways bat des records. Dieu avait donné l'athlétisme au Kenya et le foot au Cameroun. Le Kenya a développé ce sport et gagne toujours les médailles aux grandes compétitions. Qu'avons-nous fait de notre foot, après la médaille or de Sydney en 2000 et le quart de finale de la coupe du monde de 1990 en Italie? C'est un même régime corrompu et incompétent qui a pris en otage l'État et son administration dans notre pays depuis 34 ans et qui bloque toute avancée.

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GLOIRE ET HONNEUR AUX PATRIOTES: 8 août 1914-8 août 2016. Il y a 102 ans étaient lâchement pendus Douala Manga Bell et son fidèle secrétaire Adolphe Ngosso Din. Cette journée doit leur être consacrée et ils doivent être honorés, célébrés et cités en exemple. Ce sont les précurseurs du nationalisme camerounais. Ils ne doivent pas tomber dans les oubliettes de l'histoire.

Chers parents d'élèves, vous avez apprécié les conseils? Vous en trouverez bien d'autres dans cet ouvrage. Prenez un bon départ pour l'année scolaire 2016/2017 en vous procurant un exemplaire de cet ouvrage incontournable pour qui veut réussir. Contact: 677134916/695617377

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Que quoi? Qu'est-ce que j'entends là? Que le remplaçant de André Fotso à la tête du GICAM est un français? Pas possible. C'est inadmissible, même pour un seul jour. Comment ont-ils pu en arriver là? Imaginez-vous un américain dirigeant le patronat français? De telles choses ne peuvent arriver qu'au Cameroun.

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Le Cameroun est le seul pays d'Afrique Centrale à s'être précipité pour signer les APE. Soit les camerounais, avec leurs Agrégés de Droit et d'Economie sont les plus intelligents de la Sous-région et ont vite compris les opportunités offertes par ces accords, auquel cas on ne saurait comprendre ce manque de solidarité avec ses voisins, soit alors ils n'ont rien compris et ont foncé la tête basse dans un piège découvert plus tôt par les autres. Dans les deux cas est-ce bien raisonnable de faire cavalier seul, lorsque, avec les voisins on est confronté au même problème? A quoi sert alors la CEMAC? Juste un machin pour justifier les déplacements et les frais de mission?

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L'affaire des ordinateurs financés par un emprunt qui sera remboursé par l'Etat, était donc une piètre et basse manœuvre politicienne ayant pour seul et unique but de susciter les marches et motions de soutien des étudiants?
Comment peuvent-ils déjà dire merci alors qu'ils n'ont pas encore reçu ces ordinateurs, qui seront configurés pour leur rappeler chaque fois qu'ils vont les mettre en marche, que c'est un don de qui vous savez? Comment peuvent-ils être aussi naïfs, alors
qu'ils ne reçoivent même pas régulièrement la bourse de 50 mille qui leur avait été promise? Le Cameroun étant un pays des malversations et du faux, on peut déjà imaginer que des étudiants fictifs et les officiels chargés de la distribution vont détourner une bonne partie de ces ordinateurs pour aller les revendre pendant que les vrais destinataires seront mis à l'écart. M. Biya n'est pas conscient des torts inénarrables que son système et lui-même ont commis à ce pays. Il y a des voleurs et des prévaricateurs partout et il devrait le savoir.

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Les associations de développement qui regroupent les ressortissants d'un village peuvent-elles remplacer un Etat défaillant comme le nôtre? Leur existence même n'est-elle pas la preuve de la faillite d'un Etat otage d'un régime qui ne doit son maintien au pouvoir qu'à la corruption, aux détournements de deniers publics et à toutes sortes de malversations? Ces associations animées par "élites" bureaucratiques corrompues, expertes dans les détournements des projets de développement et des BIP et qui sont justes soucieuses de promouvoir l'image de leur régime auprès des populations désabusées peuvent-elles véritablement constituer la réponse à l’absence de l'Etat qui "ne peut pas tout faire"? Quand ce sont les populations qui initient la création des établissements scolaires, les construisent, les équipent et payent le personnel tant bien que mal, qu'à fait l'Etat de nos impôts? Quel est le rôle régalien des pouvoirs publics, finalement?